(ROMAN EN LIGNE)
LE COUP DE CHAUD
-31-
LE COUP DE CHAUD
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Un roman... et c'est évidemment Tony™ qui s'y recolle ! Sacré Tony ™ ! Un roman... ou une somme de lignes superposées au mouvement de l'air ambiant. Un de ces procédés écologiques pour dire la couleur verte qui lui coule dans les yeux au lieu d'une industrie lourde incapable de le distraire vraiment. Un roman... disons plutôt une correction à la volée d'un vieux manuscrit laissé pour compte par faute de temps, l'été 2003. Le coup de chaud... où ce qui arrive à force de prendre des douches froides au travers du cadre strict d'une météo de merde. Le coup de chaud ou une façon de décliner un paquet d'histoires anciennes, des engrenages, la mécanique rouillée des passions en retard. L'effort illuminé d'en découdre avec ses vieilles leçons de voyages, les malles défaites un peu partout dans le coeur de gens admirables et réconfortants. Le coup de chaud... comme on dirait : de La poésie, le cinéma... un tas d'emmerdements à la fin.
CHAPITRE 15
JUILLET 1970
JUILLET 1970
Au mois de Juillet 1970, soit un an exactement après l’exploit exceptionnel de la mission Apollo XI et quelques semaines avant le piteux record de Luna 16(X) censé permettre aux soviétiques d’arrêter de passer pour des cons plus longtemps dans les derniers soubresauts de la course aux étoiles, Antoine était donc réapparu sur le seuil du café de l’horloge qui n’avait pas encore changé de nom. En conséquence, ce fut alors ce brave Kane qui se chargea une dernière fois de servir le reporter de guerre dont il jura plus tard qu’il ne l’avait pas encore reconnu à ce moment-là.
-X- Luna 16 fut l’une des 24 missions d’un programme de voyages spatiaux inhabités lancées par l’Union soviétique entre 1959 et 1976. En septembre 1970, plus d’un an après le retour victorieux d’Apollo XI, Luna 16 réussit cette magnifique « performance » d’un retour automatique de 101 grammes d’échantillons de sol lunaire vers la terre. De sorte qu’à ce petit jeu du plus gros tas de cailloux ramassés dans l’espace, les américains l’emportèrent largement et sans aucune discussion possible, comptabilisant 382Kg de roches en 6 voyages habités, contre seulement 326 grammes dans le camp opposé. Oui, un sacré putain de caillou d’avance !
Le type fumait lorsqu’il était entré. Tony s’en souvenait très bien. Tony pouvait d’ailleurs corroborer tout ce qu’il avait écrit dans ses cahiers depuis ce jour-là : Les fragrances d’épices dans l’encadrement de la porte d’entrée lorsque la silhouette d’Antoine l’avait franchie de son allure exsangue. Cette fumée jaune sur son visage affreusement triste... Son côté vétéran du Vietnam qu’on devinait facilement à quelques signes caractéristiques cousus sur un sac qu’il portait à l’épaule. Tony se souvenait de tout, mais le flic sut tout de suite que cette tête de con n’avouerait jamais rien.
C’était tout juste un an après qu’Antoine s’en fut allé pour son baptême du feu dans le golf du Tonkin. Un an jour pour jour après que Marie eut à quitter son amant sur le quai d’une gare, et avec cette certitude propre à ce qu’on appelle généralement l’intuition féminine, que son amant, son grand amour ne reviendrait pas. Ce jour, cette date du 21 juillet (202e jour de l’année du calendrier grégorien et 30e jour du Cancer(X) ) dont la jeune femme avait fini par se convaincre qu’elle lui portait la poisse à cause d’une sorte de déglinguage du temps cosmique ou peut-être aussi d’un immense trou d’air dans l’ordre des planètes... À commencer par ce 21 juillet 1964 où Tony lui était tombé dessus sans prévenir, avec son air de ne pas y toucher... Son gentil maçon au début. Ses yeux roulés en boule et sa tête au carré. Un petit gars du bâtiment plutôt bien fait malgré sa taille réduite, qui avait su la faire jouir quatre ou cinq nuits durant, avec ses bras d’haltérophile et son sens du rythme, son instinct de la cadence qui faisait sa réputation auprès d’une catégorie d’employeurs spécialisés dans les constructions à bas prix, le début de l’immobilier low cost. Et puis tout s’était très vite enrayé : La naissance de Jules sous le signe des gémeaux, à cause d’un oubli, d’une petite erreur de calcul. (Ce troisième signe du zodiaque qui s’entendait plutôt mal avec les vierges à cause de leur côté timide, réservé ; leur sens de l’ordre, leur manie du tri, ce goût exacerbé pour l’organisation. Les vierges... que les Gémeaux trouvaient en général trop maniaques à leur goût !) Tony et son nom de famille impossible à porter. « Chaumont... Un nom de ville... » Marie avait fini par détester jusqu’à son propre prénom collé devant. « Marie », un petit nom dont tout le monde prédisait qu’il finirait par tomber rapidement en désuétude à cause d’une connotation religieuse un peu cruche, son caractère de reine vierge ostensible complètement dépassée, d’immaculée conception... une pietà italienne dorée à l’or fin, son cul brossé à l’eau écarlate pour épater les corbeaux. Marie pensa alors à un oiseau d’ébène... perché sur le minuit lugubre... Marie Chaumont, arrêtée, plantée là par le bec d’un volatile baudelairien, un corbeau immuable. Marie éplorée, cabrée sur son lit de plumes atomiques !... mais bon, passons. Les ténèbres et rien de plus. Oui, cela seul et rien de plus avait à son tour répété Baudelaire à l’instigation d’Edgar Poe (Marie était folle d’Edgar Poe. Peut-être aussi parce qu’elle se trouvait une certaine ressemblance physique avec le portrait de Sarah Elmira Royster à 15 ans, le grand amour d’enfance du poète américain génial, l’inventeur dit-on, du roman policier qui l’avait éperdument aimée jusqu’à son dernier souffle. Plus tard, Marie avait aussi trouvé beaucoup de similitudes entre le seul visage connu de Sarah à 15 ans et Jane March au même âge, cette actrice qui interprète Marguerite Duras jeune fille dans l’Amant adapté au cinéma par Jean-Jacques Annaud). Ce 21 juillet, dont Marie avait lu quelque part que la date coïncidait encore à celle de cet incendie célèbre du temple d’Artémis à Éphèse, l’année 356 av JC ; ce jour, funeste, oui, de la naissance Alexandre le macédonien, l’incendiaire frustré de la magnifique Persépolis au royaume de Perse. Oui, une regrettable coïncidence pour l’héritage et la conservation du patrimoine culturel mondial. Mais depuis on avait l’UNESCO...
Pour arriver enfin à ce 21 juillet 1969 dans la nuit (cette sorgue glauque répandue sur l’écran perlé, ce goût amer qui lui restait collé au palais lorsqu’elle essayait de se rappeler d’abord ce fleuve brûlant, puis cette aube longue suintante sur sa peau).
-X- Cancer. 22 juin au 23 juillet. Un des signes les plus sensibles du zodiac et gouverné par la lune. La nature du Cancer est émotive, tendre et imaginative. Un signe attiré par le merveilleux, le mystique. Il recherche avant tout une forme d’aboutissement dans la sécurité sentimentale. Ceux du troisième décan présentent l’attrait d’une nature rêveuse, vaporeuse... et très stable en amour.
-X- Luna 16 fut l’une des 24 missions d’un programme de voyages spatiaux inhabités lancées par l’Union soviétique entre 1959 et 1976. En septembre 1970, plus d’un an après le retour victorieux d’Apollo XI, Luna 16 réussit cette magnifique « performance » d’un retour automatique de 101 grammes d’échantillons de sol lunaire vers la terre. De sorte qu’à ce petit jeu du plus gros tas de cailloux ramassés dans l’espace, les américains l’emportèrent largement et sans aucune discussion possible, comptabilisant 382Kg de roches en 6 voyages habités, contre seulement 326 grammes dans le camp opposé. Oui, un sacré putain de caillou d’avance !
Le type fumait lorsqu’il était entré. Tony s’en souvenait très bien. Tony pouvait d’ailleurs corroborer tout ce qu’il avait écrit dans ses cahiers depuis ce jour-là : Les fragrances d’épices dans l’encadrement de la porte d’entrée lorsque la silhouette d’Antoine l’avait franchie de son allure exsangue. Cette fumée jaune sur son visage affreusement triste... Son côté vétéran du Vietnam qu’on devinait facilement à quelques signes caractéristiques cousus sur un sac qu’il portait à l’épaule. Tony se souvenait de tout, mais le flic sut tout de suite que cette tête de con n’avouerait jamais rien.
C’était tout juste un an après qu’Antoine s’en fut allé pour son baptême du feu dans le golf du Tonkin. Un an jour pour jour après que Marie eut à quitter son amant sur le quai d’une gare, et avec cette certitude propre à ce qu’on appelle généralement l’intuition féminine, que son amant, son grand amour ne reviendrait pas. Ce jour, cette date du 21 juillet (202e jour de l’année du calendrier grégorien et 30e jour du Cancer(X) ) dont la jeune femme avait fini par se convaincre qu’elle lui portait la poisse à cause d’une sorte de déglinguage du temps cosmique ou peut-être aussi d’un immense trou d’air dans l’ordre des planètes... À commencer par ce 21 juillet 1964 où Tony lui était tombé dessus sans prévenir, avec son air de ne pas y toucher... Son gentil maçon au début. Ses yeux roulés en boule et sa tête au carré. Un petit gars du bâtiment plutôt bien fait malgré sa taille réduite, qui avait su la faire jouir quatre ou cinq nuits durant, avec ses bras d’haltérophile et son sens du rythme, son instinct de la cadence qui faisait sa réputation auprès d’une catégorie d’employeurs spécialisés dans les constructions à bas prix, le début de l’immobilier low cost. Et puis tout s’était très vite enrayé : La naissance de Jules sous le signe des gémeaux, à cause d’un oubli, d’une petite erreur de calcul. (Ce troisième signe du zodiaque qui s’entendait plutôt mal avec les vierges à cause de leur côté timide, réservé ; leur sens de l’ordre, leur manie du tri, ce goût exacerbé pour l’organisation. Les vierges... que les Gémeaux trouvaient en général trop maniaques à leur goût !) Tony et son nom de famille impossible à porter. « Chaumont... Un nom de ville... » Marie avait fini par détester jusqu’à son propre prénom collé devant. « Marie », un petit nom dont tout le monde prédisait qu’il finirait par tomber rapidement en désuétude à cause d’une connotation religieuse un peu cruche, son caractère de reine vierge ostensible complètement dépassée, d’immaculée conception... une pietà italienne dorée à l’or fin, son cul brossé à l’eau écarlate pour épater les corbeaux. Marie pensa alors à un oiseau d’ébène... perché sur le minuit lugubre... Marie Chaumont, arrêtée, plantée là par le bec d’un volatile baudelairien, un corbeau immuable. Marie éplorée, cabrée sur son lit de plumes atomiques !... mais bon, passons. Les ténèbres et rien de plus. Oui, cela seul et rien de plus avait à son tour répété Baudelaire à l’instigation d’Edgar Poe (Marie était folle d’Edgar Poe. Peut-être aussi parce qu’elle se trouvait une certaine ressemblance physique avec le portrait de Sarah Elmira Royster à 15 ans, le grand amour d’enfance du poète américain génial, l’inventeur dit-on, du roman policier qui l’avait éperdument aimée jusqu’à son dernier souffle. Plus tard, Marie avait aussi trouvé beaucoup de similitudes entre le seul visage connu de Sarah à 15 ans et Jane March au même âge, cette actrice qui interprète Marguerite Duras jeune fille dans l’Amant adapté au cinéma par Jean-Jacques Annaud). Ce 21 juillet, dont Marie avait lu quelque part que la date coïncidait encore à celle de cet incendie célèbre du temple d’Artémis à Éphèse, l’année 356 av JC ; ce jour, funeste, oui, de la naissance Alexandre le macédonien, l’incendiaire frustré de la magnifique Persépolis au royaume de Perse. Oui, une regrettable coïncidence pour l’héritage et la conservation du patrimoine culturel mondial. Mais depuis on avait l’UNESCO...
Pour arriver enfin à ce 21 juillet 1969 dans la nuit (cette sorgue glauque répandue sur l’écran perlé, ce goût amer qui lui restait collé au palais lorsqu’elle essayait de se rappeler d’abord ce fleuve brûlant, puis cette aube longue suintante sur sa peau).
-X- Cancer. 22 juin au 23 juillet. Un des signes les plus sensibles du zodiac et gouverné par la lune. La nature du Cancer est émotive, tendre et imaginative. Un signe attiré par le merveilleux, le mystique. Il recherche avant tout une forme d’aboutissement dans la sécurité sentimentale. Ceux du troisième décan présentent l’attrait d’une nature rêveuse, vaporeuse... et très stable en amour.
(À SUIVRE)