jeudi 16 octobre 2008

LE PANOPTIQUE DE NÉON™ / 2




LE PANOPTIQUE DE NÉON™ / 2
Le "panoptique" progresse dans les colonnes de Néon™. Une rubrique régulière pour dénicher des réflexions, des morceaux d'esprits... Une sorte d'antimanuel récurent des pipe-line de la pensée dirigée.



BLACK MARKET / ROBERT RAUSCHENBERG



une totalité (de faits) n’est pas réductible à la somme de ses parties, et présente des traits d'un genre qui lui est propre.

sui generis


À PROPOS D'UN COURS PROFESSÉ PAR ÉMILE DURKHEIM À LA FACULTÉ DES LETTRES DE BORDEAUX ET À LA SORBONNE SUR LE CONTRAT SOCIAL DE ROUSSEAU. MORCEAUX CHOISIS...


Préoccupé par l'intégration des individus dans les sociétés démocratiques modernes et engagé publiquement dans l'affaire Dreyfus, Durkheim fait valoir un "individualisme moral" contre un "individualisme utilitaire". Au nom de cet "individualisme moral, Durkheim assure "qu'il n'y a pas de raison d'état qui puisse excuser un attentat contre la personne quand les droits de la personne sont au dessus de l'état". cet individualisme consacre à l'individu sa valeur universelle : sa dignité d'humain, respectable et sacrée. Par là même, il repproche à Rousseau l'idée de vouloir réduire la solidarité sociale à l'union autour des lois qui "attachent les individus au groupe, non les individus entre eux ; ils ne sont solidaires les uns des autres que parce qu'ils sont tous solidaires de la communauté". Une telle société implique en substance, des individus complètement interchangeables et aliénés au processus d'unité sociale. Au contraire Durkheim propose la philosophie d'une société non homogène fondée sur la spécialisation des tâches et des fonctions. Par conséquent, cette société a besoin d'individus non interchangeables, précisément valorisés par "les caractères différentiels" qu'ils apportent à la société.
Dans une société complexe, les individus sont conduits à négocier et à se concerter directement, en faisant usage de leurs compétences respectives et complémentaires. Mais il tâche aussi de montrer que la liberté individuelle n'est pas acquise au prix d'une illusoire indépendance. "L'individu" dit Spinoza" n'est pas un empire au sein d'un empire". "Il faut", conclut sur ce point Durkheim "que notre société reprenne conscience de son unité organique, que chacun sente cette masse sociale qui l'enveloppe et le pénètre.
Mais le sociologue rejoint vite le noble précurseur de l'étude des moeurs et des coutumes humaines, lorsqu'il s'agit de dresser le constat des inégalités sur le terrain de la socialisation "innée ou conjoncturelle" des individus.
Le développement social, reprend l'enseignant, a suscité des inégalités artificielles qui sont tout à fait contraires à celles que comporte l'état de nature. Ces inégalités artificielles dépendent d'une sorte de convention sociale qui consiste dans les différents privilèges, dont quelques-uns jouissent, au préjudice des autres, comme d'être plus riches, plus honorés, plus puissants qu'eux. Cette convention a pour effet de mettre entre les mains d'individus ou de certains groupes d'individus, qui à l'état de nature ne seraient pas supérieurs aux autres, parfois même leur seraient inférieurs, des forces exceptionnelles qui leur confèrent, par conséquent, une supériorité contre nature. "Il est manifestement contre la loi de la nature, de quelque manière qu'on la définisse, qu'un enfant commande à un vieillard, qu'un imbécile conduise un homme sage et qu'une poignée de gens regorge de superfluidités tandis que la multitude affamée manque du nécessaire. C'est surtout l'institution conventionnelle de l'hérédité qui a suscité ces inégalités artificielles. La propriété et l'institution héréditaire, comme la première violation des lois de la nature. "L'homme est né libre, et partout il est dans les fers" Du contrat social, I, 1, O.C., t. III, p. 351.


Émile Durkheim est un des fondateurs de la sociologie moderne. Au cours de sa vie, le type croisa Jaurès et Bergson (le petit veinard !) Agrégé de philo, il enseigna à Bordeaux de 1887 jusqu'en 1902 ou il fut nommé à la Sorbonne.