jeudi 27 mars 2008

YÉMY



LITTÉRATURE


GEORGES YÉMY
"LE TARMAC DES HIRONDELLES"
ÉDITIONS HÉLOÏSE D'ORMESSON

(d'après une photo de) ©ARNAUD FÉVRIER

(L’écrivain était à Besançon pour une soirée littérature et reggae)


(TOUT CE QUE VOUS AVEZ PERDU DE NE PAS VENIR... À CAUSE D’UN MATCH DE BALLON SUR TF1 OU D'UN ÉNIÈME DOCU-DÉBILE CONSACRÉ AUX TÊTES COURONNÉES SUR UNE CHAÎNE DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC).


Il y a des jours comme ça... Où plutôt, il y a des soirées et des nuits comme ça. Mais pour être tout à fait précis, Il y a surtout des livres... et des auteurs tellement rares, comme « Yémy ». Je ne sais plus s'il faut l'appeler Yémy (un nom de scène facile à retenir. Et je vous assure que c’est important que tout le monde puisse retenir le nom d’un type comme Yémy), ou plutôt Georges Yémy (le nom immense de "Yémy" avec son prénom à lui devant) ou encore Georges Sätkà-Chännkà Yémy (son véritable nom, en entier, toutes les lettres qui honorent sa famille, son village natal, son pays d’origine - le Cameroun - et le sien, la France, le Val de Marne dans la banlieue parisienne ; le pays des belles lettres françaises au moins jusqu’à Céline si vous oublier Beckett. Le pays des belles lettres d’avant Beigbeder). À vrai dire je suis un peu perdu, un peu vanné, un peu démit. C’était mardi, l’atterrissage sur le tarmac de la librairie Camponovo, à Besançon d’un « ami », l’extraordinaire Monsieur Yémy. Sa prose, giclée du côté obscur d’un cerveau agile comme le vent ; un virtuose, Yémy le musicien. Yémy et sa baguette magique pour convertir le plomb d’une littérature française à bout de souffle, en or dur, violent et sans concession. Yémy, l’halluciné. Un papillon de nuit capable de transformer l’infâme, l’innommable... les pires horreurs sur terre, en élixir de jouvence pour toute une langue saturée de stéréotypes d’un autre âge. Yémy. Retenez bien son nom, enfoncez-vous le dans le crâne comme la hache de guerre qu’on enterre après des années misérables à refuser de voir la vérité d’une nouvelle langue en train de naître, bien en face. Car cherchez bien, soyez objectif !... Existe-t’il aujourd’hui dans ce si doux et si calme pays des lettres Françaises surannées, un écrivain, un type si capable de renverser d’une ligne, de quelques phrases neuves, inspirées, cinglantes, cette habitude des poncifs, des truismes, des clichés... Yémy invente, ce type-là est un artiste unique. Incorporant à l’art ancien, le meilleur de la poésie classique, les dialectes modernes et l’argot d'un temps le plus récent. Un délire, un trip... La méthode James Joyce. Un Ulysse reconstruit. Et vogue alors le nouveau navire bourré de promesses. Un cargo porteur de vers nucléaires ; l’embarcation reconstituée du roi d’Ithaque, armée pour en découdre avec les préjugés, les compromis abominables du monde vieillissant, aliéné, incapable de concéder la moindre place aux métamorphoses titanesques qui s’imposent dans son monde cramé aux « saintes écritures ». Yémy est fils d’Éole et pourfendeur de la malfaisante Circé. L’auteur de l’étonnant « Suburban Blues », celui de ce magnifique « Tarmac des hirondelles »... est le seul, oui ! L’unique plasticien actuel, capable de rompre la géométrie parfaite du « cercle insécable » d’un coup d’air de reggae. Yémy mixe la multitude, ouvre le champ de l’irrémédiable jusqu’au tréfonds des antichambres du pouvoir arbitraire, reconductible. Un théâtre d'ombres infinies dans la voilure pittoresque du temps qui passe. « J'avais chaud et froid en même temps ». Écrit l'enfant soldat Yémy « Impression soleil mourant, en cendres, bien qu'encore vert et levant. Auroral trouble. J'avais chaud et froid en même temps ».


Le « Tarmac des hirondelles » est l'histoire d'un enfant soldat ; une guerre quelque part en Afrique... L'endroit précis n'a pas d'importance. Un enfant, assassin malgré lui ; sa route tracée vers le monde souterrain de Téphrapolis, la citée des cendres. Une simple guerre, mille guerres possibles, mille époques, mille géographies. Un môme de onze ou douze ans... la tête, le ventre et la bite éclatée aux drogues nécessaires pour continuer de grandir dans les charniers les yeux ouverts. L’impossible, l’irrémédiable quête d’un enfant aux ailes brûlées par le sang, les viols, la gerbe... Muna Nussadi, le petit soldat errant... Assez adulte pour ouvrir le ventre de ses semblables - un bain de sang atroce – mais encore trop jeune pour qu’on lui concède le droit d’aimer une femme avec ses tripes. Le « Tarmac » est un champ de bataille de l’âme humaine, le bruit d’un chaos infernal, l’extrémité, l’indicible... Un atterrissage forcé au royaume de l’horreur, sans espoir de rédemption. Comment un homme droit comme Yémy peut-il écrire avec tant de beautés sur un sujet si terrible ?!... La question me hante. Oui, cette lecture m'obsède. Tant d'horreurs ! et cette mélodie si belle, cette fulgurante magie du verbe... Mystère terrifiant. Maudits ce « Konda » et tous les « pères de la nation » du monde. Maudit Zeus et Jupiter, et maudits soient, tous les pouvoirs de la terre.
JL Gantner



ENTRETIEN FILMÉ LE 25/03/2008 À BESANCON/FRANCHE-COMTÉ



© 2008 / JL GANTNER - LE JOURNAL DE NÉON™


YÉMY + UNITONE (À LA COUR DES MIRACLES)


© 2008 / JL GANTNER - LE JOURNAL DE NÉON™


YÉMY À LA LIBRAIRIE CAMPONOVO


© 2008 / JL GANTNER - LE JOURNAL DE NÉON™




Georges Yémy était à Besançon grâce à l'action de la librairie Camponovo et de l'association LIPHISA


DE L'AUTEUR :
-La lune dans l'âme 1997
-Suburban Blues 2005
-L'inévitable histoire de chacun 2006
-Tarmac des hirondelles 2008