D'abord cette « Lancia Flaminia Zagato super sport coupée 3C 2.8 » ... dans un état parfait, proposé, bon oui, évidemment !... pour tout de même un peu plus de 180 000 FCH —Mais l'objet est assez rare, dessinée dans les prestigieux ateliers milanais dans l’esprit de cette autre « Aston Martin DB4 GT » de 1960 croquée par Ercole Spada et produite à l’époque à seulement 19 exemplaires — pour être noté dans un journal, même borné à quelques digressions intimes et artistiques dans le for intérieur du temps qui passe et des vapeurs de voyages incessants, bien qu'entièrement gratuit, comme ce Journal de Néon™. (Peut-être moins de cinquante exemplaires dans le monde à l'heure qu'il est (cette bonne heure Suisse à la seconde près !) pour ce V6 qu’adorait l’acteur Marcello Mastroianni. Cette scène « évidemment ! » où cette jolie Anita Ekberg et son Marcello… s’embrassent dans les eaux tumultueuses de la fontaine de Trevi. Cette impérissable « Dolce Vita » romaine de l’immense Fellini. Toute cette pellicule de gâchée aujourd’hui, sous les coups de boutoirs des algorithmes faciles, des modes de compressions pratiques et désenchantés !)
Une voiture et son élégance magnétique dans son acier brossé d'origine
au hasard d'une vitrine commerciale de l’agglomération Baloise, alors
qu'on avait rendez-vous dans l’instant à la foire et « qu’elle… »
n’aurait aucune possibilité matérielle de m’y rejoindre pour me serrer
dans ses bras à elle. Que l’odeur de sa peau, que ces yeux qui brillent
dans le noir ; que son ventre, que l’intérieur de ses cuisses et malgré
tous ses commerces anciens, toutes nos distances égoïstes, tous nos
malentendus …
Certains penseront qu'une bagnole en vaut bien des centaines d'autres, qu’une paire de phares un volant et un moteur sous le capot… comme beaucoup de ces épicuriens blasés penseraient aussi qu'un baiser peut en valoir des dizaines d'autres dégainés à n’importe quel coin de rue dans la lumière des néons... Ce drame, cette tragédie de la société de consommation (mais la notion s’est tellement dérobée depuis ce cher Andy, n’est-ce pas ?!) Je crois qu’il m’était arrivé d’être sur le point de lui parler de Rauschenberg sur un morceau d’Heather Nova… « I’m the girl » ; de Paul K « Flood the market » ou de Brandon Chandler « Starting over »… le tout joué sur une radio numérique embarquée pendant que la chaine sautait de mon dérailleur dans la grande bosse de la Colombière. Une pente infernale des Alpes françaises pour rejoindre le massif des Aravis depuis la vallée de Cluses. Plus de 1000 mètres de dénivelé sur plus de 15KM. Lui parler de Rauschenberg… de Pollock ou de Jasper Johns alors qu’on avait même pas commencé d’évoquer Rothko, ni même envisager la moindre discussion autour du boulot de Joseph Kosuth. Cette certaine image du monde réel… cette certaine idée du langage et de toute la légitimité des histoires d’amour pour arrêter d’être en train de crever tout le temps à l’intérieur d’une bande son écœurante… « Motherfuckers » peignait Bruce Nauman au début des années 70. Bruce Nauman et ses écritures… « lumineuses » aux frontons des baraques à frites, des machines de barbe à papas et des peep shows. « Sex ans death by murder and suicide, 1985 ». Et qui ne s’est pas un jour un peu retrouvé dans ce « clown torturé » d’un des plus grands artistes du siècle pris au jeu de son propre rituel ?!... face à face avec son propre masque d’amertume et grimé à l’excès pour faire marrer les gens de passage. Un des ces clown supplicié, piégé comme un con dans sa propre rigolade litanique. Cette sempiternelle affaire de ritournelle du temps qui passe. Cette fatigue des postures à tenir sous les églises et leurs files de combines….
Et moi qui voulait vous parler d’une rencontre « au camping » de Bale avec Clément Cividino… Un jeune collectionneur d’art, entiché de l’architecte Georges Candilis (un pote d’atelier du Corbusier dans ce paquet d’années seventies prolifiques dont nous ne cessons de causer ici). Candilis, l’architecte d’origine grecque associé à la « Cité radieuse de Marseille » et ces « Hexacubes » tombés eux… dans l’oubli. (Des baraques de vacances en plastique dans leurs couleurs exactes ou leur créateur les avaient fait peindre pour les futurs estivants de Port Barcarès…) avant que Monsieur Cividino replace ces modules de villégiature futuristes dans le contexte de la grande foire de l’art et du Design d’Art Basel cette année 2012.
En 1972, Georges Candilis avait installé ce « camping de l’an 2000 » (27
« Hexacubes ») sur la commune de Leucate dans le Languedoc Roussillon.
Un type d’habitat en polyester au confort franchement dépouillé, qui
répondait à la philosophie de son auteur d’imaginer une nouvelle manière
de vivre : « Le cubing ». L’idée d’un habitat modulaire et évolutif en
fonction de l’agrandissement de la famille et de l’augmentation de ses
revenus… (Tout un beau programme de réjouissances libérales au pays des
autruches le bec planté dans un paquet d’oursons en guimauve et enrobé
de chocolat croquant… )
JLG
PHOTOS © Jean-Luc Gantner 2012