dimanche 30 mars 2008

BLEUZ


PORTFOLIO


BLEUZ
Bleuz ne se prend pas au sérieux. Le type, photographe très inspiré par le modèle "rétro-futuriste" se dit volontiers pessimiste... Son métier dans le domaine hospitalier... Insiste-t'il. Les malades incurables.











jeudi 27 mars 2008

YÉMY



LITTÉRATURE


GEORGES YÉMY
"LE TARMAC DES HIRONDELLES"
ÉDITIONS HÉLOÏSE D'ORMESSON

(d'après une photo de) ©ARNAUD FÉVRIER

(L’écrivain était à Besançon pour une soirée littérature et reggae)


(TOUT CE QUE VOUS AVEZ PERDU DE NE PAS VENIR... À CAUSE D’UN MATCH DE BALLON SUR TF1 OU D'UN ÉNIÈME DOCU-DÉBILE CONSACRÉ AUX TÊTES COURONNÉES SUR UNE CHAÎNE DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC).


Il y a des jours comme ça... Où plutôt, il y a des soirées et des nuits comme ça. Mais pour être tout à fait précis, Il y a surtout des livres... et des auteurs tellement rares, comme « Yémy ». Je ne sais plus s'il faut l'appeler Yémy (un nom de scène facile à retenir. Et je vous assure que c’est important que tout le monde puisse retenir le nom d’un type comme Yémy), ou plutôt Georges Yémy (le nom immense de "Yémy" avec son prénom à lui devant) ou encore Georges Sätkà-Chännkà Yémy (son véritable nom, en entier, toutes les lettres qui honorent sa famille, son village natal, son pays d’origine - le Cameroun - et le sien, la France, le Val de Marne dans la banlieue parisienne ; le pays des belles lettres françaises au moins jusqu’à Céline si vous oublier Beckett. Le pays des belles lettres d’avant Beigbeder). À vrai dire je suis un peu perdu, un peu vanné, un peu démit. C’était mardi, l’atterrissage sur le tarmac de la librairie Camponovo, à Besançon d’un « ami », l’extraordinaire Monsieur Yémy. Sa prose, giclée du côté obscur d’un cerveau agile comme le vent ; un virtuose, Yémy le musicien. Yémy et sa baguette magique pour convertir le plomb d’une littérature française à bout de souffle, en or dur, violent et sans concession. Yémy, l’halluciné. Un papillon de nuit capable de transformer l’infâme, l’innommable... les pires horreurs sur terre, en élixir de jouvence pour toute une langue saturée de stéréotypes d’un autre âge. Yémy. Retenez bien son nom, enfoncez-vous le dans le crâne comme la hache de guerre qu’on enterre après des années misérables à refuser de voir la vérité d’une nouvelle langue en train de naître, bien en face. Car cherchez bien, soyez objectif !... Existe-t’il aujourd’hui dans ce si doux et si calme pays des lettres Françaises surannées, un écrivain, un type si capable de renverser d’une ligne, de quelques phrases neuves, inspirées, cinglantes, cette habitude des poncifs, des truismes, des clichés... Yémy invente, ce type-là est un artiste unique. Incorporant à l’art ancien, le meilleur de la poésie classique, les dialectes modernes et l’argot d'un temps le plus récent. Un délire, un trip... La méthode James Joyce. Un Ulysse reconstruit. Et vogue alors le nouveau navire bourré de promesses. Un cargo porteur de vers nucléaires ; l’embarcation reconstituée du roi d’Ithaque, armée pour en découdre avec les préjugés, les compromis abominables du monde vieillissant, aliéné, incapable de concéder la moindre place aux métamorphoses titanesques qui s’imposent dans son monde cramé aux « saintes écritures ». Yémy est fils d’Éole et pourfendeur de la malfaisante Circé. L’auteur de l’étonnant « Suburban Blues », celui de ce magnifique « Tarmac des hirondelles »... est le seul, oui ! L’unique plasticien actuel, capable de rompre la géométrie parfaite du « cercle insécable » d’un coup d’air de reggae. Yémy mixe la multitude, ouvre le champ de l’irrémédiable jusqu’au tréfonds des antichambres du pouvoir arbitraire, reconductible. Un théâtre d'ombres infinies dans la voilure pittoresque du temps qui passe. « J'avais chaud et froid en même temps ». Écrit l'enfant soldat Yémy « Impression soleil mourant, en cendres, bien qu'encore vert et levant. Auroral trouble. J'avais chaud et froid en même temps ».


Le « Tarmac des hirondelles » est l'histoire d'un enfant soldat ; une guerre quelque part en Afrique... L'endroit précis n'a pas d'importance. Un enfant, assassin malgré lui ; sa route tracée vers le monde souterrain de Téphrapolis, la citée des cendres. Une simple guerre, mille guerres possibles, mille époques, mille géographies. Un môme de onze ou douze ans... la tête, le ventre et la bite éclatée aux drogues nécessaires pour continuer de grandir dans les charniers les yeux ouverts. L’impossible, l’irrémédiable quête d’un enfant aux ailes brûlées par le sang, les viols, la gerbe... Muna Nussadi, le petit soldat errant... Assez adulte pour ouvrir le ventre de ses semblables - un bain de sang atroce – mais encore trop jeune pour qu’on lui concède le droit d’aimer une femme avec ses tripes. Le « Tarmac » est un champ de bataille de l’âme humaine, le bruit d’un chaos infernal, l’extrémité, l’indicible... Un atterrissage forcé au royaume de l’horreur, sans espoir de rédemption. Comment un homme droit comme Yémy peut-il écrire avec tant de beautés sur un sujet si terrible ?!... La question me hante. Oui, cette lecture m'obsède. Tant d'horreurs ! et cette mélodie si belle, cette fulgurante magie du verbe... Mystère terrifiant. Maudits ce « Konda » et tous les « pères de la nation » du monde. Maudit Zeus et Jupiter, et maudits soient, tous les pouvoirs de la terre.
JL Gantner



ENTRETIEN FILMÉ LE 25/03/2008 À BESANCON/FRANCHE-COMTÉ



© 2008 / JL GANTNER - LE JOURNAL DE NÉON™


YÉMY + UNITONE (À LA COUR DES MIRACLES)


© 2008 / JL GANTNER - LE JOURNAL DE NÉON™


YÉMY À LA LIBRAIRIE CAMPONOVO


© 2008 / JL GANTNER - LE JOURNAL DE NÉON™




Georges Yémy était à Besançon grâce à l'action de la librairie Camponovo et de l'association LIPHISA


DE L'AUTEUR :
-La lune dans l'âme 1997
-Suburban Blues 2005
-L'inévitable histoire de chacun 2006
-Tarmac des hirondelles 2008

mardi 18 mars 2008

NÉON™ DU CÔTÉ NOIR


GENRE LITTÉRAIRE...


CHOISIR UN BON LIVRE DANS LE « NOIR ».

Le genre « Noir» :
Une épaisse couche de matière foncée dans une paire d’idées pas plus claires.
Ou comment réussir à dénicher le livre parfait dans la couleur noire, un noir brillant au milieu d’un tas de « sombritudes » convenues.


PHOTOGRAMME EXTRAIT DE "NO COUNTRY FOR OLD MEN" DE J & E. COEN
(VOIR LA CRITIQUE DU FILM DANS LE JOURNAL DE NÉON™)

J’en étais resté au (Dahlia noir) de James Ellroy, au fabuleux Truman Capot (De sang froid), au (Corbeau) de Clouzot, aux (Tueurs) de Robert Siodmak (d’après une nouvelle D’Ernest Hemingway) ; à (Laura) d’Otto Preminger, à (Sueurs froides) d’Alfred Hitchcock ou au (Faucon maltais)... Oui, j’en étais resté à Fred Vargas avec une nette préférence pour le cinéma de David Lynch. (Blue velvet, Twin peaks, Lost highway ou Mulholland drive). Un tas de « trucs » de Rian Johnson, des frères Coen ou de Steven Soderbergh... Pas un français ! Je ne saurais dire exactement pourquoi ?!... Aucun « régional de l’étape. Melville ou Chabrol peut-être pour le cinéma, j’en oublie sûrement ! Pierre Soulages pour la peinture et ça n’a vraiment rien à voir avec la matière sombre dont il est ici question. Un Noir anglais, irlandais, suédois... un « Noir » américain, du nord pour commencer. La crise de 29 comme point départ d’un genre nouveau, inédit dans la littérature mondiale. Une voie diabolique, la transmission de valeurs du monde par son côté obscur ; l’expression du génie du mal. (Où il est tout de suite question de cette manière très largement foncée des sentiments, comme l’apanage d’un mode d’appréciation tout anglo-saxon et protestant du genre humain, soucieux de préserver sa libre-pensée, libre et sans décorum intempestif pour lui pourrir la vie créative de vieilles broques clinquantes, sacrées, intouchables ?) « Ouhhh, Ouhhh !... entends-je brailler derrière mon dos par toute une garde rapprochée du modèle culturel français, son caractère « exceptionnel » et surradministré » qui fait plus une thune au-delà des frontières nationales. Le Noir... et je m’amusais d’entrée à propos de toute une flopée de définitions intellos-puériles qui désignaient la « sombritude », « la ténèbritude » ou la « sanguinolance » en la matière de ce procédé narratif inépuisable, élevé au rang de genre singulier, indépendant, par opposition à tout ce qui serait plus clair dans l’auguste chose des belles-lettres "locales".

PHOTOGRAPHIE © DAVID LYNCH (EXPOSITION PERSONNELLE À LA FONDATION CARTIER, PARIS 2007



BANDE ANNONCE D'INLAND EMPIRE / DAVID LYNCH


Le roman noir... heuh et bein, c’est-à-dire que, je ne suis pas très sûr de bien réussir à définir le rayonnage chez les marchands de couleurs en série sur l’étagère de droite en haut ou peut-être un peu plus à gauche que je pensais. Vargas... Si, oui ! Fred Vargas (Ceux qui vont mourir te saluent, Debout les morts, Pars vite et reviens tard, Sous les vents de Neptune). Mais on me dit que ce serait plutôt à ranger dans la case « Polar ». « Noir, Polar »... Bon, et alors ?! Et puis j’ai rencontré Jean-Bernard Pouy. Un type qui passe inaperçu, pas grand, pas très bien fringué, genre l’air de rien ou de pas grand-chose. Un Pouy ni flic, ni vraiment gangster, détective privé alors ?! Écrivain, éditeur, touche-à-tout. Pouy... (Spinoza encule Hegel, Nychtémère, La petite écuyère à Kafté). Un Pouy prolifique, lucide, sensible, drôle, inventif, et qui ne mâche pas ses mots pour dénoncer cette politique française de la petite case de genre dédiée à sa littérature préférée. Une case du genre populaire par opposition au bon genre de la grande et vraie littérature qu’on vend à la manière forte sur les bancs de l’école pour ne plus jamais avoir envie de les acheter plus tard sinon dans la pléiade pour le cuir idéal de ses belles couvertures et le papier de messe qui craque de manière sympathique sous les doigts. Une petite case de genre, qui peut aussi vite donner dans le mauvais genre. Oui, peut-être, sûrement ! Faut dire que quelquefois le noir sent aussi la gare de triage, la graisse de mécanos laborieux et les trains régionaux en retard de dix aiguillages, le crime vite fait, le sang pâteux, les plaies faciles à recoudre et les gâchettes de revolvers de marques périmées... Bref, le noir n’est pas toujours parfait. Mais voilà donc, que ce Pouy déboule dans ma vie par le biais d’une interview improvisée dans un salon fait tout exprès pour célébrer les évangiles du genre glauque, de la gorge tranchée jusqu’au sexe, et du bide plié en quatre pour que tout tienne dans le hachoir électrique imprimé sur la quatrième de couverture qui déchire sa mère à la Fnac. « Vous oubliez Maurice G. Dantec comme il y eut aussi Philippe Porée-Kurrer ou Jean Amila... » C’est un lecteur assidu qui se mêle de notre conversation, le genre... très sûr de lui. « Des maîtres du genre, des paquets de gars inspirés, visionnaires et à la plume toute écorchée. Toute une bonne école française ». Ah bon. Dantec... évidemment ! Ce type en costard sombre, planqué derrière ses lunettes opaques, légèrement ésotérique sur les plateaux télé. Le prince du néopolar ; Dantec, l’oracle. (Artefact), une descente du word Trade Center, le matin du désastre et un tueur qui signe un pacte avec le diable. Une série de démonstrations par l’absurde du mal humain, du mal inscrit dans les gènes un peu tordus du genre humain. Des meurtres comme une leçon de chose écrit sur le mode « mondiovisionné, épuré », simplissime. J’avoue, oui, avoir préféré continuer de converser avec ce Pouy souriant, drôle... plutôt qu’avec un Dantec mystique et abscond... Sachant pour être honnête, que la chose ne s’est toutefois pas présentée. Pour tout dire, un type qui se la pète un peu à cause de son passé d’ex futur rock star ou je sais pas, mais le noir lui sied tellement bien. Une armure ailée, taillée en forme de Ray Ban ostensibles pour essuyer plus facilement les chocs de son propre drame intérieur exposé au vide sidéral d’un plateau télé et du public médusé qui n’y comprend rien.

JAMES JOYCE

Le Noir... Et je ne pouvais déjà plus m’empêcher de penser à Joyce. À cet Ulysse de Dublin. Fut-il, pensais-je alors... Fut-t’il un livre plus noir que ce « livre de voyage » ? l’hymne homèrien d’un alcoolique prodigieux. Joyce, l'exilé, titubant dans son temps, son putain de mauvais temps. Joyce, une loque géniale, céleste. Oui, voilà, je préfère ce noir-la tangible, radical... aux ténèbres mystiques étalées pompeusement sur les plateaux de télévision à la mode pour vendre des billets de trains faciles à prendre, un simple numéro de cirque. Joyce... ou un Pajak écrivain-dessinateur dépressif aux yeux de chien polaire racontant l’histoire de Joyce avec son (Humour) à lui VOIR L'ARTICLE CONSACRÉ À PAJAK DANS NÉON™. Pouy n’était pas vraiment d’accord ou peut-être qu’il l’était au contraire, bien plus que je ne saurais l’imaginer du haut de mon caractère de cochon rempli de préjugés. Oui, voilà, on avait beau me dire et cet adorable Pouy aussi, que San Antonio était formidable, qu’Agatha Christie aussi, que Stephen King aussi... Mais je pensais (aussi)... que le temps nous était compté, qu’il n’était pas possible de tout lire et fort heureusement je suppose. (J’entendais d’ailleurs cette émouvante statistique qui recensait seulement 9% des français capables de lire plus d’une vingtaine de bouquins par an – Que pouvaient bien faire les autres pendant leurs heures de boulot et autant de nouvelles heures supplémentaires à continuer de se faire chier sans une bonne ligne de poésie à se mettre sous les yeux ? – un chiffre qui ne cessait de décroître au fil des ans, malgré toute la publicité, le marketing, les salons, les prix... exorbitants des reliures en carré collés !) Qu’il fallait donc faire des choix, s’en tenir à une certaine ligne de conduite, à une certaine ligne de défense, une ligne de fuite si vous préférez. Aussi, j’orientais mes propres choix dans cette gamme de sombres, sur des « bifurcations post-modernes. J’entends par là l’œuvre d’un Paul Auster par exemple (Moon palace, Léviathan, La musique du hasard), le genre des digressions exagérées, des mises en Abymes ; le genre des samples, celui des fragments samplés du monde invisible, sensible. Le genre du labyrinthe. « (...) mais de même qu'un pas entraîne immanquablement le pas suivant, une pensée est la conséquence inévitable de la précédente... » écrit Auster.

Pour finir, je me disais que ce Noir dont on parle depuis tout à l’heure se reflétait si bien dans la commission cinématographique d’un Lars Von Trier cynique dans Dogville ou dans Breaking the waves. Comme le noir convenait si bien à Houellebecq toujours fringué en clair fripé, pour continuer de fumer en pleine lumière sans qu’on repère le nuage de nicotine dans les ombres d’un veston trop chic campé sur les mauvaises odeurs de son maillot de corps ! Du noir perché à la hauteur considérable de grandes œuvres originales, plutôt que du Noir brillant qui en jette sur une couverture convenue, consacrée au monde pourri et dégueulasse dont je conchie la facilité d’esprit et la versatilité d’opinions. Oui, bon !


LE CHOIX DE NÉON™

Tout ça, très rapidement, pour vous dire qu’il me fallait tout de même faire le choix d’un livre, dans le « genre » bon livre du « genre bien Noir » du moment, puisque telle était le sujet, le contrat passé entre nous. Alors voilà, j’hésitais... La théorie des cordes de José Carlos Somoza ou Les Bienveillantes (le succès de librairies qu’on connaît et un joyeux débat télévisé entre Valérie Pécresse et Philippe Sollers pour savoir s’ils avaient lu le même livre l’un et l’autre en commençant par le bon chapitre. Je vous jure que c’est vrai !)... ("Putain, ça y est, y recommence. On s’en fout de la télé. On t’a dit du noir bon dieu ! Du noir et rien d’autre. Éteins ton écran plat, bois un coup et pisse ta copie".) Bon, ok, ok ! Je me concentre. Alors si je disais : Yemy pour le (Tarmac des hirondelles). Ça vient tout juste de sortir des presses chez Héloïse d’Ormesson. L’histoire d’un môme quelque part au Soudan, en Somalie ou ailleurs... enrégimenté dans une armée de la mort. Des cadavres partout. C’est hurlant de douleur, une authentique désolation. L’enfer, le pire sur terre, quasi psalmodié par un conteur d’origine camerounaise, (l’auteur du « sublissime » Suburban blues) car Yémy joue de la mélopée comme d’autres auteurs « Noirs » jouent de la hache ou du rasoir finement aiguisé. Une histoire vraiment affreuse et tellement bien écrite. En plus l’auteur est vraiment noir pour le coup, un vrai roman de noir... Je ne peux pas vous dire mieux. Et vous me dites : « Toujours pas assez noir !? »

CORMAC MCCARTHY

Alors voilà mon dernier mot et qu’on n'y revienne surtout pas. À l’unanimité de mon opinion personnelle donc... Et désolé d’y revenir après le film, sa critique dans le journal de Néon™ et son Oscar le lendemain à Hollywood, Los Angeles, Californie, Etats-Unis d’Amérique... But tne winner is Cormac Mccarthy pour No country for old men (Non ce pays n’est pas pour le vieil homme) qui remporte allégrement la partie. Un désert dans l’état du Texas, des trafiquants de drogue la tête explosée, une valise remplie de pognon et une chasse à l’homme qui commence.
Néon™



VOIR LE SITE : POL'ART NOIR
VOIR LE BLOG : NOIR COMME POLAR







LA LIBRAIRIE CAMPONOVO PROPOSE UN "VENDREDI NOIR" LE 18 AVRIL. UNE SOIRÉE POLAR AVEC LES ÉDITIONS GALLIMARD. Invités : Caryl Férey, DOA et Antoine Chainas


dimanche 16 mars 2008

NÉON™ EN LIGNE




ART PLASTIQUE

LES LIGNES PHOTOMOBILES™ / JL GANTNER
THÈME DE TRAVAIL : LA COMMUNICATION, LES ÉCHANGES
En substance : L’identité, sa construction et sa reconstruction. Les appellations d'origine, les marques de fabrique et l'image de marque™.

LE DISPOSITIF : Ce sont des Lignes de matière photographique frappées d'un pictogramme courant et libre de droits utilisé dans le domaine de la signalétique.

L’ensemble, en tant que dispositif structurant, limite le champ des possibles à la seule configuration définie par la forme arbitraire du visuel. Je pensais en substance à une idée générale à propos de la communication et des médias et qu’il était temps de nous entendre sur notre manière de voir. Je pensais d’abord au problème d’identité, à la notion d’origine. Je pensais aux images en tant qu’elles laissaient des traces, des marques. Je pensais aux images de marque… la marque de fabrique des Photomobiles™


L'OUROBOROS (LOGO SUR ENSEIGNE COMMERCIALE) / © JL GANTNER


Ces Lignes interrogent sur le sens et la valeur des échanges. Elles posent la question de l’identité. « Qui sommes-nous, où allons-nous ? et par delà : quel chemin suivre ? La question est universelle et malgré tout, toujours subversive… Les Lignes photoconductrices sont des flux, des voies de communication transcendantes ; des axes, des trajectoires rêvées. Elles sont "des traces à suivre idéales". Elles sont cela ou autre chose… Je pensais : L’efficacité de ces Lignes réside dans la puissance symbolique du visuel, un visuel capable d’exister pour lui-même et uniquement pour lui-même. De l’art pour l’art… disait Reinhardt ! De la communication pour la communication, de l’information pour l’information, dirons-nous aujourd’hui ! un simple procédé de communication visuelle, prisonnier de lui-même, comme le monde en est chaque jour abreuvé. (Ceci ou bien cela, l’expérience est binaire, ce qui n’arrange rien ! Les Lignes sont des vecteurs de communication à l’ère du tout numérique. Elles conduisent notre vision, instrumentalisent notre point de vue selon des protocoles algorithmiques. Ceci ou bien cela ? C’est à vous de choisir… mais je vous inviterai volontiers à ne rien choisir du tout justement, à vous laisser conduire par vos propres sentiments. Je vous invite à vous comporter plutôt en "amoureux" disait Roland Barthes. Oui, ces Lignes-là réagissent à la pleine lumière de vos sentiments profonds. ces Lignes-là sont "photo-sensibles", et c’est là leur moindre défaut ; leur marque de fabrique, leur… image de marque devrais-je dire.

Alors, entendez-moi bien : c’est à voir, je vous dis ! c’est le sens de ces Lignes. Ne cherchez pas plus loin. Je vous dis tout, et ne vous cache rien. Tout est comme je vous dis que c’est à voir et pas autrement. Suivez la ligne… vous êtes dans la bonne direction. Là, voilà, vous y êtes ! Ne bougez plus. Surtout, restez figés.

Je pensais en substance : qu’est-ce qui distingue l’art actuel de la télévision, du design… de la publicité en général ? C’est son identité, son origine… Là d’où il vient et par conséquent là où il va. L’art est une question sur l’identité, une quête perpétuelle de ses origines, alors qu’à la télévision, dans la publicité en général… l’origine est une appellation contrôlée. C’est une marque de fabrique, une image de marque. Aussi, je crois que je ne saurai jamais qui étaient vraiment Picasso, Rauschenberg, Basquiat ou Rembrandt… mais je ne sais que trop où TF1, France 2 ou Darty veulent en venir.



© JLGANTNER /2006


Alors suivez ces lignes-la ou bien préférez le vaste champ des possibles. C'est à vous de voir...


L'OUROBOROS (VARIATION) / ©JL GANTNER

Le visuel se communique, il n’a plus désir que de soi. Vertige du miroir. Dans la société de l’après-spectacle nous dit R. Debray, l’autre devient une espèce en voie de disparition, et l’image, image d’elle même. Narcissisme technologique, c’est-à-dire repli corporatif de la « communication » sur son nombril…/… le visuel sert, oui, et aussi a ne plus regarder les autres…/… le visuel indique, décore, valorise, illustre, authentifie, distrait, mais ne montre pas. Aussi, alors que l’image déstabilise, le visuel sécurise.
Il en résulte une certaine manière de voir, conditionnée dans son emballage graphique, prête à être usinée, standardisée et multipliée rapidement s’il le faut, comme la technologie de l’information le permet aujourd’hui pour tout dire et surtout n’importe quoi.




LES LIGNES À HAUTE TENSION
(Travail à propos du caractère suprasegmental dans la valeur des échanges)

"Les lignes" sont des vecteurs de flux sur lesquels "les signes" atteignent leur valeur absolue. Ou si vous préférez : contextualisé par la ligne, le signe est perçu comme un objet "translaté", mobile, dont la valeur s'exprime au gré des caractéristiques du segment. L'ensemble (ligne/signe) est topologique et opère in situ (par exemple à l'intérieur d'un cadre pour limiter son champ d'action, comme ce quadrilatère pour les images reproduites ci-dessous).


LES LIGNES À HAUTE TENSION (TRIPTYQUE) / © JL GANTNER





mercredi 12 mars 2008

PIERRE DESPROGES



PIERRE DESPROGES EST MORT IL Y A VINGT ANS...

L'humoriste fut tout d'abord journaliste à L'aurore, à la rubrique des chiens écrasés. Menacé de licenciement pour son caractère jugé trop caustique, il débute sa carrière d'humoriste en 1975 dans l'émission du Petit rapporteur de Jacques Martin aux côtés de son complice Daniel Prévost.



" On ne m'ôtera pas de l'idée que, pendant la dernière guerre mondiale de nombreux juifs ont eu une attitude carrément hostile à l'égard du régime nazi".

"Si j'ai bien compris votre démarche, vous entendez faire écrire votre livre à l'oeil par une bande de nègres gratuits dont vous comptez sur la verve ou le talent pour pallier votre propre incompétence littéraire. En échange de quoi vous toucherez les droits d'auteurs à leur place. C'est normal, puisque c'est vous qui avez la machine à écrire. (...) Certes, vous n'aurez pas un mot de moi dans votre prochain ouvrage, parce que plus le temps passe et me presse avant que mort s'ensuive, plus j'ai tendance à écrire pour nourrir ma famille et moins j'ai envie d'arroser la vôtre."

Chronique de la haine ordinaire.
Pierre Desproges

lundi 10 mars 2008

NÉON™, NIETZSCHE ET SON BOULOT À LA TÉLÉ



ET SI NIETZSCHE ÉTAIT JOURNALISTE À LA TÉLÉVISION.


UNE DIGRESSION... À PARTIR D'UN TEXTE DE MICHEL ONFRAY "L'INNOCENCE DU DEVENIR" PUBLIÉ AUX ÉDITIONS GALILÉE.


C’est une conversation entre Nietzche et Wagner. Le compositeur demande au philosophe comment il se porte depuis leur dernière rencontre à Leipzig un an plus tôt. « Du nouveau depuis ? Des projets ? Où en êtes-vous ? »
NIETZSCHE. – J’ai été nommé professeur de philologie à l’université de Bâle.
« Bravo ». Wagner félicite le jeune enseignant.
NIETZSCHE. – Oh vous savez, un professeur de plus, Il n’y a pas de quoi pavoiser. J’ajoute mon nom à la cohorte des gens qui rabâchent à l’université ! Pas de quoi être vraiment fier. Je n’ai guère envie de me réjouir à l’idée de cette carrière de philistin1 qui s’ouvre à moi. Grossir le troupeau des professeurs, on a connu de meilleurs destins (Résigné, haussant les épaules.) Mais il faut bien vivre.

PORTRAIT DE FRIEIDRICH NIETZSCHE


Plus tard... Nietzsche parle avec Overbeck. Nous sommes en 1873 à Bâle et le professeur Nietzsche déplore le peu d’entrain des élèves pour ses cours.
NIETZSCHE. – Deux élèves, tu te rends compte, seulement deux élèves... Tu crois qu’on m’évite à cause de la publication de ma Naissance de la tragédie ? C’est ça ?
Overbeck semble embarrassé. Il dit que oui, peut-être... C’est probablement ça. Les professeurs d’université n’aiment pas les pensées libres, les discours qui s’affranchissent de l’institution. Ton usage de la philologie à des fins... disons contemporaines, l’opéra, la musique de Wagner, la restauration des valeurs en Allemagne, la culture à venir, voilà qui fâche les habitués des petits problèmes de version grecque ou de thème latin. Et puis détail aggravant, tu as eu un certain succès, et ils n’aiment pas le succès. En plus, tu as eu du succès en dehors de leurs petits cercles. Ils ne te le pardonneront pas...
NIETZSCHE. – Que puis-je faire pour inverser le cours de tout cela ?
OVERBECK. – Rien, malheureusement, je le crains.
Plus tard... NIETZSCHE est dans sa chambre. Le jeune professeur est allongé. Une migraine ophtalmique, des nausées, des maux d’estomac. Les rideaux sont tirés. Il gît sur le lit, souffrant. (Le texte est très librement interprété à partir d'extraits de "Linnocence du devenir" de Michel Onfray. Qu'il me pardonne cette errance...)

1- Philistin - pour ceux qui ne s'en souviendraient pas ! - se dit d'une personne au goût vulgaire, hermétique aux choses des beaux-arts et aux affaires des belles lettres. Quelqu'un d'un peu fermé à la nouveauté. Entendez par là le caractère fréquemment rencontré chez pas mal de gens des médias à la mode ces temps-ci, et du monde audiovisuel en particulier.


Et voilà, à partir de cette note... l'idée, le propos dont je voulais vous entretenir et secrètement tirée d’une véritable expérience, d’une expérience vécue (et pardonnez cette digression). Car voilà. Alors que je dévorais le « scénario de La vie de Nietzsche » sous la plume de Michel Onfray. L’idée m’est venue, l’allégorie possible, la parabole idéale... d’un Nietzsche salarié d’une rédaction de l’audiovisuel public en remplacement de sa fonction de professeur d’université de la « grande Bâle » aux abois après une guerre gagnée. Un Nietzsche contemporain, tout autant donné pour fou aujourd’hui parmi ses collègues... qu’à son époque. Oui, imaginez ce formidable Nietzsche, l’auteur du considérable Gai savoir, tout préoccupé par les grandes choses du monde et de la révolution des esprits engoncés de son temps, transporté derrière un bureau de Formica aux couleurs d’une chaîne de télévision de service public comme il fut longtemps prisonnier derrière sa table de professeur universitaire. Oui... car telle aurait pu être sa place en ce début de XXIe siècle. Oui, tel aurait pu être son choix, son destin de rapporteur d’une civilisation en mouvement, dans le but de tenter d’en formuler une critique constructive par le biais du média le plus « visible », le plus approprié du moment. Un Nietzsche ancré dans son temps, honnête et progressiste. Un conquérant de la vérité, pourfendeur de routes platoniques immuables ; un moderne, un Socrate. Monsieur Frieidrich Nietzsche, journaliste à France 3 pour être plus proche des gens, parce qu’il aurait choisi de parler à tous de la vérité vraie, au plus près de leurs intérêts, sans restriction marchande, sans compromis commercial. Un journaliste altruiste, prêt à en découdre avec les fixes en général et la morale d’esclave d’un humanisme dévoyé depuis des lustres dans la déférence à son prince, quels que furent les princes qui se sont succédé sur l’estrade médiatique.



Alors voilà, ce Nietzsche à qui je pensais, un Nietzsche journaliste à France 3, équipé de sa caméra à dix briques sur l’épaule et toute une équipe technique spécialisée pour le rassurer en cas de noyade cathodique collective. Ce Nietzsche-là, filmant un Dionysos grec sous les traits d’un pâle Bacchus romain dans les yeux hagards et anémiques de son rédacteur en chef. Le type, l’apparatchik un peu blême à cause du caractère excessif de sa hiérarchie directe qui ne vaut pas beaucoup mieux... n’entend rien à l’idée de ce portrait étrange d’un Dionysos réconcilié avec son pote Apollon. « Convenons d’un sujet plus simple » dit-il, « plus conforme. Et convenons d’abord de ce que vos transports spirituels ne m’intéressent guère en ce domaine de l’errance dont vous savez faire preuve à maints égards... Admettez en préambule qu’il serait profitable à votre carrière de savoir respecter en toute occasion le contrat hiérarchique qui contingente nos rapports professionnels. Je vous avais convié à ce traitement d’un Bacchus en temps en heure, un Bacchus tout occupé aux joies de l’ivresse populaire et voilà que vous mégottez sur un Dionysos alors que c’est interdit de fumer partout. Soyez plus moderne mon vieux, soyez d’actualité ! Soyez de cette télé qui enivre les foules à bon compte, soyez à l'heure et réclamez votre augmentation de salaire comme tout le monde ». Nietzsche se disloque, tombe la caméra si lourde, encombrante. « Mais, Monsieur le rédacteur en chef, je vous parle là d’un événement cosmique, capital pour l’avenir de la civilisation et duquel notre métier doit entretenir toute la communication savante par le truchement de la raison et de ses commodités pédagogiques. Consentez-moi ce temps nécessaire de l’élucubration, de la divagation ; celui de mille pistes à explorer pour enfin réussir à étayer notre verdict sur la chose qui vous semble tant entendue sans même accepter d'y préter une oreille attentive. Oui, permettez-moi seulement, oh prince ! – et voyez que je fais preuve d’un certain respect pour votre scène bien réglée – de mener mon enquête jusqu’au bout. Apollon et Dionysos réconciliés, vous ne mesurez pas ?!... »
« De toute façon, rétorque le patron, vous êtes en RTT demain, et vous devez rendre votre copie sur le champ au cadre de service qui tranchera pour l’édition du soir. Bacchus / Dionysos... Qu’est-ce que vous voulez que ça me foute à moi ! On est en pleines Municipales mon pauvre. Faut être de partout à la fois. Du premier et du deuxième tour ; régler les éclairages, coordonner les plannings des gens malades avec ceux à qui on a promis une pécuniaire dans le mystère des alcôves... Et avec ça, la gauche qui fait une percée en plein milieu des réformes. Qu’est-ce que les gens ont dans la tête non de Dieu ! » « Dieu est mort Monsieur le rédacteur en chef, Dieu est mort depuis longtemps et l’homme avec ». Conclue le simple reporter culpabilisant un peu d’avoir répondu un truc aussi con devant un type si sérieux.

Le soir, Nietzsche discute avec un ami exerçant dans la même officine depuis bien plus longtemps que lui. « Tu sais. Dis Nietzsche. Je crois qu’ils ne m’aiment pas. »
« Ils sont jaloux, c’est tout ». Dit l’autre journaliste. « je le connais bien. Au Dionysos éternel voyageur, au Dieu grec errant, à l’étranger... ceux-là – en philistins – préfèrent un amusant Bacchus, un Polichinelle romain. C’est tellement plus rassurant pour eux ! » Ils ne t’aiment pas parce que tu ne leur ressemble pas.
Ces journalistes-là n’aiment pas les pensées libres, les discours qui s’affranchissent de l’institution. Ton usage du métier à des fins... disons contemporaines, la curiosité du monde au delà de son propre nombril, l’émancipation de tous comme forme d'horizon, l'analyse critique, le dépassement de soi dans l'altruisme, le voyage, l’esprit de mobilité, l'expérimentation de nouveaux outils, la polyvalence... Bref, la culture à venir, voilà qui fâche les habitués des petits problèmes de "remplissage" de journaux ou d'égalitarisme à tout pris. Et puis détail aggravant, tu as eu un certain succès par le passé, et ils n’aiment pas le succès. Ça les gêne, eux qui n’en ont pas ou si peu. En plus, tu as eu du succès en dehors de leurs petits cercles. Et ça, ils ne te le pardonneront pas...
NIETZSCHE. – Que puis-je faire pour inverser le cours de tout cela ?
L’AUTRE JOURNALISTE. – Rien, malheureusement, je le crains.

Dés le lendemain, Nietzsche pris la route du midi, celle de Turin, le port de Gênes... « La télévision de service public comme Notre nouvel infini... » pensa le journaliste en proie à de terribles maux d’estomac, et ça ne faisait que commencer.
Néon™


L'APOLLON DU BELVÉDÈRE copie romaine d'un original du IVe siècle av. J.-C. de Léocharès



ANNA A / I



LES SUCRERIES LITTÉRAIRES D'ANNA A

Elle n'a pas encore vingt ans. Néon™ vous propose de la lire... Des textes courts qui passent par la tête d'une jeune fille sur la vie qui va, sa vie à elle. Quelques lignes de temps en temps, à déguster comme une douceur. Un caramel, une pomme d'amour... Bref ! de la littérature comme un peu de miel au rayon confiserie de la librairie de Néon™.



I / La Pomme d’Amour


On est entouré de lumières clignotantes, de manèges infernaux et de carrousels endiablés. L’odeur de la barbe à papa nous englobe alors que l’on s’avance lentement dans les allées enchantées. Puis soudain, une rangée de boules écarlates, brillantes. «- Dis maman, qu’est-ce que c’est ? », « -des pommes d’amour mon ange.» Des pommes d’amour, ces mots résonnent et sonnent, se balancent, le « p » crépite, le « o » s’étonne pendant que les « m » de la pomme d’amour ramollissent la dureté du « po » et murmurent « mange-moi » et le tout se conclue sur ce « r » amer et râpeux, c’est si dur de s’arrêter : on en veut encore. On s’avance pour les voir de plus près et l’on voit nos deux yeux s’y refléter. Elles sont belles, d’une rondeur régulière, pas comme celles que l’on voit sur les étalages lorsque l’on va sur le marché. Celles-là semblent provenir d’un pays magique comme celui du tableau de Mary Poppins et l’on se dit que l’on aimerait bien croquer nous aussi à ce fruit défendu. On se met sur la pointe des pieds pour capter l’attention de la marchande à la doudoune rose bonbon. Elle nous regarde et, rempli d’espérance, on prononce enfin les mots de la délivrance « une pomme d’amour s’il vous plaît » puis on dépose une petite pièce sur le comptoir. Et l’on goûte alors à l’amour pour la première fois : une pomme juteuse, un peu acidulée recouverte d’une belle robe rouge difficile à percer et qui croque un peu sous la dent, et lorsque l’on parvient enfin sous l’épaisse carapace, la chair paraît douce, presque molle. On souhaiterait alors que ce goût reste quoiqu’il arrive imprégné sur nos papilles pour toute la vie. Nul ne connaît le secret de cette robe trompeuse et délicieuse capable de transformer n’importe quel corps quotidien en objet fascinant. C’est cela le secret de la pomme, le secret de l’amour, le secret de la pomme d’amour.
Anna A

vendredi 7 mars 2008

FRÉDÉRIC PAJAK



LITTÉRATURE - DESSIN


"J'avais vingt-deux ans, pas un sou en poche. Je dessinais, j'écrivais, ou plutôt j'écrivais où je dessinais, je ne sais plus..."


RENCONTRE / FRÉDÉRIC PAJAK – AUTOPORTRAIT

« Enfant, dans l’hôtel de famille qui fait boucherie, dans un village d’Alsace, le trot d’un cheval me réveille à l’heure de la sieste. Je me lève, l’observe par la fenêtre : il chie sur les pavés de la cour. Cela dure une éternité. Tout à coup, le boucher entre dans ma chambre, me prend dans ses bras, me conduit dans l’arrière boutique. Là, il me penche sur une lourde baignoire remplie d’eau où baignent des dizaines de cervelles de cervelles d’agneau ensanglantées. Tout ce que j’ai vu depuis, et qui tente de se substituer à ce crottin et à ces cervelles, me paraît superflu. C’est ainsi : chacun fabrique ses yeux avec sa folie, son gentil bonheur, sa petite honte. » L’autoportrait de Frédéric Pajak commence comme ça sous un dessin au trait, juste après la photo noir et blanc d’un enfant appuyé sur une couverture en papier glacé, un close up. « L’autoportrait n’est pas qu’une copie de soi-même. » écrit le dessinateur à propos de Michel-Ange. « Il est une manière de diagnostic qu’aucune littérature ne peut supplanter, qu’aucune musique ne peut improviser. »


Le dessinateur, l’écrivain, le directeur des cahiers dessinés... était à Besançon, invité par la librairie Camponovo pour parler de son Autoportrait.

L’homme est assis face au public, les orbites enfoncées ; une sorte de sourire réticent qui lui sort par la vue. Le type n'est pas vraiment coiffé, un costume noir aux coutures blanches ultra voyantes faites exprès ; des chaussures de sport gris clair à la mode au pied du beau costard ; les talons en l’air, en éventail, les orteils appuyés en dedans comme le font souvent les écoliers gênés sous leur pupitre. L’entourent deux jeunes femmes qui l’interrogent, émues comme le reste du public, embarrassées de mille précautions. C’est le jeu, la foire aux questions. La salle est pleine à craquer, Pajak... répond par bribes, ne s’aide jamais de ses mains pour ajuster la structure indécise de ses phrases. De la haute couture intériorisée, mais l’artiste n’est pas habitué aux podiums, un défaut admirable. « Peut-on parler d’autofiction dans votre travail ? » C’est la jeune fille à droite de l’écran qui pose la question notée au stylo sur une feuille de bristol. Pajak bouge enfin ses deux épaules en même temps, prenant soin de garder la tête droite pour éviter de rompre avec la consistance de sa chorégraphie contenue. « Autofiction... Je ne sais pas ce que ça veut dire ? Je ne sais pas à quoi ça fait référence, un de ces termes encore, qui limite forcément. » « Le cinéma... ? l’autre jeune femme déplace doucement le sujet, défroisse lentement le sourcil gauche redressant ses notes, elle se lance, cambrée : « Des dessins, des photos, des textes alternés. En vous lisant, on pense à un montage... Est-ce qu’on peut rapprocher votre travail d’une œuvre cinématographique ? » « Oui, j’ai toujours pensé que les dessins pouvaient correspondre à la bande son, et les textes à la mise en image d’un film ». Pajak se fait plus moelleux, il sourit. Pajak déteste la BD qu’il qualifie « d’objet pour adolescents attardés », mais adore les story-boards de cinéma.


L’Humour... La conversation préférée de Pajak, le type en abuse dés qu’il trouve le moyen d'en passer par là. (Oui, je sais, le procédé peut paraître déplacé, importun, en total désaccord avec l’idée qu’on doit absolument se faire des gens quand ils écrivent des trucs, des « farces » géniales avec du noir si fort à toutes les pages ; des gens forcément tristes, mélancoliques plutôt, ce qui n’est tout de même pas la même chose ! Des gens « glauques » et leurs yeux rentrés pour éviter de répandre les trop plein de sentiments à la face des autres). L’Humour... Une biographie de Joyce écrite à la première personne avec son ami Yves Tenret en 2001 (ce souvenir que leurs pères se furent tous deux prénommés Jacques et sont morts dans un accident de voiture). L'humour... la dérision de Joyce. L’histoire d’un bus... comment vous dire... « Je dessine » dit Pajak, « parce que c’est difficile de dessiner, je trouve ça assez laborieux, je n’ai jamais vraiment su. Regardez cet autocar par exemple... ». La quarantaine de personnes présentes dans la salle suivent un geste du doigt esquissé par l’auteur vers une sélection de dessins originaux accrochés à la mezzanine. (je lis 900 euros sur une plaquette recensant la liste des objets à vendre). « C’est compliqué de dessiner toutes ces fenêtres. Je crois que j’étais à Turin », dit Pajak... (Mais peut-être confond-il, peut-être veut-il plutôt parler de Dublin ?!... Peut-être pense-t’il à cette histoire de chauffeur de bus qui filait sans préméditation dans la nuit irlandaise vers la tour Martello (les premières pages d’Ulyssse). Cette étrange notion de la vérité encore... « J’étais assis à la terrasse d’un café avec un cahier, de l’encre et des pinceaux. J’ai dû commencer à lire un journal et partir d’une image d’autocar, une simple photo dans le journal ». (Et peut-être avait-il raison, peut-être ne confondait'il pas Dublin et Turin... Nietzsche n'avait-il pas perdu la raison à Turin ? tout le monde sait ça !) Le type poursuit : « C’est très dur de dessiner un autocar, vous savez ! C’est très compliqué. J’ai utilisé cette simple photo et je l’ai falsifié, voilà. » Les gens rient, un silence juste après, net. Il rajoute : « Les enfants aiment beaucoup dessiner des autocars, des voitures... Mais ça ne dure pas très longtemps ». « Je me suis intéressé à l'alcoolisme de l'auteur d'Ulysse, la tragédie de sa vie de famille » (Sait-on que chez les Joyce, on est alcoolique de père en fils ? Mais comment aurait-il pu en être autrement ? Son génie pour la saoulerie fut sa véritable patrie.). Deux heures presque sans un mouvement superflu. Pajak parle, tient son rôle dans les tons sombres, toute une gamme de nuances ténébreuses, glisse sur Nietzsche, Apollinaire, Proust aussi. Tout le monde a bu juste après. Oh ! pas plus qu'il n'en faut pour délier les langues et quoi qu'il en fut de celle quelquefois absconse d'un Pajak hors cadre. Il faisait tellement noir cette nuit-là. Vous êtes passé juste sous le portrait de Victor Hugo, dessinateur lui aussi, comme vous disiez qu’il fut tellement de traceurs de sentiments égarés sous le poids de tout ce qu’on préférait retenir d’une manière générale pour éviter de parler du reste. On a traversé la place Granvelle... Il était tard déjà. Les platanes encore tièdes d'une chaleur espagnole déprimée sur les murs immobiles. Tout est rentré dans l’ordre après le dessert et un café serré. Topor, Reiser, Nietzsche, qui sais-je ? Un corps d’humanité fracassé dans le noir épais d'un rêve falsifié. C’était bien. « Tout peut bien disparaître » disiez-vous... « et tout disparaît si bien ».
Néon™


AUTOPORTRAIT - P.41 / FRÉDÉRIC PAJAK / ÉDITIONS L'ARBALÈTE GALLIMARD

AUTOPORTRAIT - P.11 / FRÉDÉRIC PAJAK / ÉDITIONS L'ARBALÈTE GALLIMARD

"Écrire sur soi comme on peidrait un autoportrait, c'est tout sauf s'attacher à sa biographie, se perdre dans des confessions ou exhiber son journal intime. Néanmoins, cela tient d'une nécessité comparable : forcer la lumière, et l'ombre donc - et toute l'ombre d'abord. L'idéal serait de pouvoir se mentir à soi-même avec tant de justesse qu'à la fin de sa propre comédie, dans les débris du décor en toc, surgisse non pas la vérité vraie, mais son feu follet, dansant entre les phrases pulvérisées en forme d'aveux." AUTOPORTRAIT (EXTRAIT) P.94 FRÉDÉRIC PAJAK ÉDITIONS L'ARBALÈTE GALLIMARD.


"J'aime pas la B.D."
Film réalisé le 6/03/08 à la librairie Camponovo/Besançon






Frédéric Pajak est né en 1955 dans les Hauts-de-Seine
Il a reçu le Prix Michel-Dentan 2000
Il dirige la collection « Les Cahiers dessinés » aux éditions Buchet-Chastel


- En avant pour la subjectivité / 1979
- Le Bon Larron / Bernard Campiche, Editeur, Roman,1987
- Les poissons sont tragiques, 1974-1989 / Kesselring 1989
- Le cahier de la Rue Oudinot / Les illusions 1996
- Martin Luther, l'inventeur de la solitude / Editions de l'Aire 1997
- L'immense solitude / PUF 1999
- Le chagrin d'amour / PUF 2000
- Nervosité générale / PUF 2001
- Humour /PUF 2003
- Nietzsche et son père / PUF 2003
- Mélancolie / PUF 2004
- Les mots des cimes / Regards du monde 2004
- La guerre sexuelle / Gallimard 2006
- J'entends des voix /Gallimard 2006


AUTOPORTRAIT de FRÉDÉRIC PAJAK - ÉDITIONS L'ARBALÈTE GALLIMARD.
CHEZ CAMPONOVO


mardi 4 mars 2008

NEON™ ET UN DIMANCHE AVEC "LILI"



UN DIMANCHE AVEC "LILI"

La jeune fille est une comédienne de 19 ans. Aurélie Gantner découverte par Jean-Louis Bachelet (pianiste et auteur dramatique, passioné de Lorca, Mishima, et Koltès). Une véritable rencontre et mille projets sur les planches.

Elle marche, légère à cause de son téléphone portable de 170 grammes qui sonne tout le temps et qu'elle voudrait changer bientôt contre un mobile aux mélodies plus douces. Allo, non, je ne pourrais pas venir parce que je suis avec mon papa à moi. Oui, au jardin du Luxembourg avec plein de gens qui marchent vite, un tas « d’hommes pressés » qui finiront sûrement la gueule enfarinée dans un platane un peu dure de la feuille. On fait des photos avec son appareil tout neuf, un Nikon™ parce qu'il préfère au Canon™. En fait je crois qu'il s'en fout. Il dit toujours que les gens qui parlent de photos avec des mots techniques et des marques accrochées de partout... ça l'ennuie ! D’accord, demain... Ouais salut. La jeune fille dépasse la statue de Sainte Geneviève sans se douter de rien. Une sainte au milieu des muses, des reines et duchesses de France. Je l’examine, elle, de ses dix-neuf ans, ne rien concéder à cette histoire de reliques sans importance pour son âme élastique, et lancer des regards vifs sur un palais façon franchement Louis XIII, le style très perspicace de son pote Richelieu qui avait un goût suffisant pour deux. Le type l’observe, guette l’instant décisif planqué derrière un bijou de la technologie moderne de 12 mégapixels équipé d’un zoom numérique qui ne sert pas toujours à rapprocher ce qu’il y a de mieux chez les gens. Mais celui-là, ça va ! Il l’ajuste, elle, sous les traits de Clémence Isaure, la rapproche de Laure de Noves avec son zoom numérique, « Beaujeu » pixellisée sous les traits d’Anne de France. Toute une « pierrerie » périmée qui fait quand même hyper classe en haut du jardin tiré à quatre épingles. Un « beau jeu » pour faire sa star devant les touristes étrangers ! Elle ; se dit que c’est son père qui débloque, que son papa à elle n’est pas vraiment net, que c’est à cause d’un paquet d’images floues qu’il a quand il est loin de ses jolis yeux à elle. Lui, mitraille comme un fou ; sa jeunesse, ses vingt ans bientôt. Elle est belle, pas sûre d'elle, magnifique... et le jardin, ampoulé remâche ses lumières passées, simple décor dans la profondeur de champ. Elle, sa manière d'être à elle, rien qu'à elle. Elle, "Antigone"... Vous me dégoûtez tous, dit-elle, avec votre bonheur ! Avec votre vie qu'il faut aimer coûte que coûte... Moi, je veux tout, tout de suite, et que ce soit entier, ou alors je refuse! Je ne veux pas être modeste , moi, et de me contenter d'un petit morceau, si j'ai été bien sage.

Et voilà. Dit le coeur... Sans la petite Antigone, c'est vrai, ils auraient tous été bien tranquilles. Mais maintenant, c'est fini. Ils sont tout de même tranquilles. Tous ceux qui avaient à mourir sont morts. Ceux qui croyaient une chose, et puis ceux qui croyaient le contraire même ceux qui ne croyaient rien et qui se sont trouvés pris dans l'histoire sans y rien comprendre. Morts pareils, tous, bien raides, bien inutiles, bien pourris. Et ceux qui vivent encore vont commencer tout doucement à les oublier et à confondre leurs noms. C'est fini. Antigone est calmée, maintenant, nous ne saurons jamais de quelle fièvre.

LILI, 01/03/2008 © JL GANTNER

Le type se dit que la jeune fille a grandi, c’est ça. Il se dit qu’elle n’est plus seulement une enfant et il n'a rien vu venir. Le type s’était dit ça lorsqu’il avait invité sa Lili, sa fille à déjeuner dans un café près de l'église St Sulpice. Samedi, juste avant de rencontrer le metteur scène favori de son actrice carrément préférée à lui. Une rencontre... un imprévu. Le vent de glace place de la Sorbonne ce premier mars, un café sous le brasero transformé en bar tabac, un paquet de Lucky's, alors que j'avais arrêté depuis au moin trois heures. Ils sont deux à remonter la rue Champollion derrière mon dos. Béatrice Bern, photographe, et Jean-Louis. "Lui", un père militaire, le général Bachelet. Commandant en chef des armées de Besançon et de Haute Savoie. L'ex Yougoslavie, le Kossovo... J'en oublie sûrement. j'ai préféré retenir l'endroit de Chamonix qui créait du sens pour nous deux bien au-delà de la couleur kaki sur les visages d'une enfance détraquée. Jean-louis, toute sa passion dans les yeux, un ami... un "frère". Elle, Béatrice, sa belle aventurière à la caméra, le coeur perforé d'images d'amour quasi mystiques. Des plans de toute beauté. leur générosité... Cette sorte d'âme. On a parlé un peu de musique, de Tarkovski (Andrei Roublev ou l'enfance d'Ivan), de Proust, de Dostoïevski... autour d'une bouteille de vin, ou deux... je n'ai pas compté. Oui, comment éviter de parler de proust quand on voyage la première fois dans le coeur des gens ?! Quatre heures du matin, un taxi, la nuit noire dans les reflets de la seine débordée, vol tranquille au dessus du parc Montceau, atterrissage rue de Courcelles. Comment oublier ?

LILI, 01/03/2008 © JL GANTNER


C’est dimanche à Paris, le lendemain sur le parvis Beauboug et puis à l’intérieur aussi, Un dimanche à l’abri pour s'épargner le silence d'un ciel vide après une nuit pareille. Un dimanche « enferraillé » dans une robe transparente façon "Rogers". Brancusi, Otto Dix ou Calder derrière les sas de sécurité... et Lili joue à monter les marches avec des escaliers automatiques. Lili Gantner, une jeune actrice de 19 ans, en pleine ascension dans des tubes en verre bien alignés, une ligne de progression toute rouge pour être sûr d’aller où elle va, dans la couleur de son coeur. Comment dire... Néon™ la connaît un peu. C'est-à-dire que j'ai suivi ses premiers pas, ses premiers regards émerveillés sur le revêtement rugeux d'un ciel splendide dont elle ne savait rien encore, et toute la grisaille qui peut couler dedans quelquefois quand il pleut un tas de saletés du genre humain. Les premiers pas d'une petite fille... tout ce qu'elle a grandi aujourd'hui. Tout ce que je n'oserai plus jamais lui dire de son talent, pour ne rien encombrer des doutes qui la grisent. Dimanche après-midi. J'avais un train à prendre, un dernier train pour le fin fond de la france à quelques pas de la Suisse. Loin, très loin du tumulte et de ses jolis yeux à elle. Lui... Néon™, Tony™, son papa™, où qui elle voudra.
Néon™


DÉDICACE



ENTRÉE GRATUITE / JL GANTNER
ULTRA COURT MÉTRAGE RÉALISÉ AU TÉLÉPHONE PORTABLE
MONTAGE EN UNE HEURE SOUS IMVOVIE/MAC
FORMAT MP4 ( 640X480) - 2'20" - 26Mo

lundi 3 mars 2008

FRIDA KAHLO


PEINTURE / FRIDA KALHO


C’est l’histoire d’une fabuleuse peinture muraliste mexicaine, le temps d’une révolution mythique contre la dictature de Porfrio Diaz, les noms d’Emiliano Zapata ou de Pancho villa, combattants de légende ; celui de Nahui Oline, la provocante et sublime Nahui. Celui surtout de l’incroyable destin de Frida Kahlo.
L'artiste n'a pas 8 ans lorsque son père d'origine allemande lui transmet sa passion pour la photographie et la peinture. c'est aussi à cet âge de l'enfance qui se termine que la jeune Frida est atteinte par la poliomyélite. Frida, l'estropiée. Lorsqu'elle rencontre l'immense Diego Rivera durant ses études de médecine, son destin d'artiste est scellé. Le chef de file du syndicat des peintres, sculpteurs et graveurs révolutionnaires va devenir son pygmalion, son amant, son mari. mais elle a 18 ans cette année là, l'année 1825. Un accident de voiture, la colonne vertébrale affreusement touchée, l'utérus transpercé. Frida s'en remet difficilement, une vie de souffrance qui commence, ses premières toiles, des autoportraits mutilés, la chair blessée... "Ce ruban autour d'une bombe" comme la définissait André Breton. Celle qui fut l'ami d'Eisenstein, de Kandinsky, de Paul Eluard, de Picasso... l'amante dit-on de Léon Trotski. À peine sortie de sa chambre d'hôpital, la jeune artiste s'engage dans le combat politique, l'émancipation des femmes. Frida revendique sa bisexualité, s'affiche en public avec la photographe Tina Modotti, s'éprend de la chanteuse Chavela Vargas... Une vie, une oeuvre exaltée.
Frida Kahlo s'est éteinte le 13 juillet 1954 dans la maison bleue de Coyoàcan à Mexico. Une villa transformée en Musée où reposent les cendres de Trotski, victime d'un complot stalinien le 20 août 1940 alors que le politicien s'était réfugié dans la demeure du couple Rivera / Kahlo.



Un document audiovisuel sur Frida Kahlo et sa relation tumultueuse avec le peintre Diego Rivera.



Frida Kahlo est interprétée par l'actrice Salma Hayek dans le film de Julie taymor (sortie 2003)



dimanche 2 mars 2008

NAHUI OLIN



PORTFOLIO


PEINTURE / NAHUI OLIN ET L'ART RÉVOLUTIONNAIRE MEXICAIN


D'abord un bouquin de Pino Cacucci. Une vieille folle qui vend des cartes postales érotiques sur l'avenue Madero... Quelques pesos réclamés aux touristes pour l'image sépia d'un corps de rêve ; un pactole pathétique ; de quoi gavé ses chats. Qui pourrait deviner ? Qui pourrait se douter que sous les rides de la vieille vendeuse, la puta, "la sorcière", se cache les traits d'une des plus formidables icônes du monde artistique des années trente ?... Ses yeux ! Il suffirait pourtant de regarder ses grands yeux verts, turquoises et violets, ceux-là même qui rendirent complètement fous tout ce qui comptait dans les années vingt d'intellectuels à la mode, de génies des arts plastiques, et jusqu'à "la bande de bohémiens de Montmartre ! (Oui, quel touriste pressé pourrait se douter ?) Une paire d'émeraudes voilées sous le ciel pourpre de Tacubaya. Il suffirait pourtant d'ouvrir grand les yeux face à cette "fresque" de Diego Rivera, le muraliste, certainement le plus important de son temps. Regarder ce corps exhibé, provocant, peint de couleurs vives à la manière naïve. Ce corps, hallucinant, accroché, à la toile naturelle d'un décor archaïque, témoin essoufflé d‘une révolution populaire et de son million de morts indélébiles. Un corps en flammes, fracassé, tâché d’un sang de ruines.


NAHUI OLINE PHOTOGRAPHIÉE PAR EDWARD WESTON

C'est l'image que beaucoup ont préféré retenir de "Maria del Carmen Mondragon Valseca", alias "Nahui Oline". Une jeune fille scandaleuse, l'égérie des années vingt au Mexique, fille de l'habile général putschiste Manuel Mondragon. Nahui de son nom de scène... qui répétait sans cesse :"Je me suis laissé photographier nue parce que j'avais un corps si beau que je n'aurais jamais pu priver l'humanité du droit d'admirer cette oeuvre".



En 1922, la senora Carmen, Nahui... pose en poésie érotique pour Diego Rivera, héroïne des 900 mètres carrés de murs enduits de l'amphithéâtre Bolivar. Une "récréation" avant que le peintre ne fasse la rencontre de Frida Kahlo. Pour Nahui Oline, c'est le temps de sa gloire immense comme modèle et celui de sa rencontre avec le Dr Atl (Gerardo Murillo) qui changerait sa vie après son mariage raté. cet amant merveilleux, son plus grand amour, sa passion dévorante, cette obsession, cette tempête... cet assassin, ce "dragon", ce salaud... ce misérable charlatan.


NAHUI OLIN ALORS QU'ELLE PARTICIPE AU MOUVEMENT DE REVENDICATIONS DES ARTISTES POLITISÉS QUI MILITAIENT DANS LE SYNDICAT RÉVOLUTIONNAIRE DES OUVRIERS, TECHNICIENS ET PLASTICIENS, FONDÉ PAR DIEGO ET SIQUEROS / 1922. SES CHEVEUX SONT COUPÉS TRÈS COURTS EN SIGNE DE PROTESTATION CONTRE LES POSTURES SOCIALES SÉCULAIRES ET TOUT AUTANT CERTAINEMENT POUR SUIVRE LA MODE DES ACTRICES D'HOLLYWOOD.

SON PÈRE, LE GÉNÉRALPUTSCHISTE MANUEL MANDRAGON

SON MARIAGE AVEC MANUEL RODRIGUEZ LOZANO LE 6 AOUT 1913

LE DOCTEUR ATL (GERARDO MURILLO)

Nahui en modèle parfaitement libéré, symbole d'un modernisme affirmé, desinhibé. Mais l'artiste fut aussi écrivain, pianiste, compositeur, actrice et peintre... une formidable coloriste.



Son amour pour le capitaine Eugenio Agacino, la dernière passion de sa vie, fut la source d'inspiration de son travail le plus abouti. E 1934 alors que l'artiste expose vingt-deux toiles à l'hôtel Regis, un article dans le grand quotidien Excelsior fait l'éloge de cette "Nahui Oline" en ces termes : "L'artiste peintre de grand talent, poétesse et compositeur, nous a montré une série de comptes rendus de son oeuvre qui nous a laissés perplexes. Pourquoi l'oeuvre de cette artiste multiforme et exceptionnelle qui a suscité tant d'éloges de la critique étrangère, n'a-t'elle pas encore été considérée à sa juste valeur au Mexique ?"