lundi 31 août 2009

INGLOURIOUS BASTERDS...



Critique
INGLOURIOUS BASTERDS...

QUENTIN TARANTINO


C’est un ami qui m’avait confié ses premières impressions à propos du dernier Tarantino... Inglourious Basterds... « Un fourre-tout ». Un de ces bazars à dix francs, où une bande de gringos armés jusqu’aux dents préparent une attaque au napalm contre les tortues Ninjas... Seulement voilà, Cléopâtre ne l’entend pas de la même oreille que Van Gogh et décide de riposter avec son pistolet laser à dix coups. C’est à ce moment-là que Rommel débarque en soucoupe volante, aidé d’une bande d’apaches prêts à tout pour sauver la fée Carabosse...





J’ai donc couru dans le cinéma le plus proche. (Un grand. Un cinéma avec une largeur d’écran suffisante pour réussir à lire les sous-titres et sans rien perdre de l’action principale à l’image. Un cinéma moderne et parfaitement sonorisé pour ne rien perdre d’un tas d’effets acoustiques ingénieux.) Persuadé de retrouver mille raisons de rire et quelque émotion d’enfance. (Ce sentiment d’excitation lorsque j'exhortais les troupes de mon camarade Achille à livrer bataille contre mes armées de chevaliers cathares.) La séance était déjà commencée. Je veux dire que le noir dans la salle et les toutes premières crépitations de pop corn m’obligèrent à ramper jusqu’à ma place préférée du troisième rang dans la tentative de retenir les deux euros cinquante de mon Magnum double chocolat qui fondait dans ma main à vue d’œil.



Comment vous dire, que je crus d’abord m’être complètement planté de salle lorsque la musique d’Alamo a jailli sur le Dolby stéréo THX pour supporter l’improbable générique de western jaune à la sauce spaghetti (Ces premières notes d’une Lettre à Élise d’où fulgure un air de cow-boy italien). Alors arrive une bagnole militaire allemande dans le fond d’un décor rural français, comme la grosse bagnole américaine aux vitres teintées débarquait dans Le soldat Ryan, annonçant la scène de la crise de larmes d’une mère à qui la guerre venait de prendre tous ces fils. Au lieu des officiers ricains sur leur 31 la gueule dans leurs chaussettes au moment d’annoncer la nouvelle à la mère de famille déconfite, on découvre Christoph Waltz/ Hans Landa bien nippé dans sa veste en cuir noir piquée d’insignes de la waffen ss (pattes de col, aigle tissé sur le bras gauche et tout le toutim...) Le ss arrive comme ça, pendant qu’une paysanne au corps divin pompe au puit un sceau d’eau dans une posture franchement suggestive. En très gros plan comme dans la caméra de Leone... un type, le genre kosovar des hauts plateaux nourri au lait de vache et au fromage de chèvre à poils longs (le père à la mine patibulaire du canon de Navarone dont je vous parle...) lorgne l’approche de l’équipée sauvage motorisée, d’un œil en trou de serrure. Waltz (le type primé à Cannes en 2009 pour sa prestation d’un nazi multilingue impeccable) entre dans la masure en bois genre chalet d’armailli en saluant trois jeunes créatures plantées sur elles-mêmes dans leurs belles robes de la campagne, d’une politesse d’officier, élégante et maintenue. En fait, le nazi est un vrai salaud ! Le genre de saloperie d’ordure de nazi comme on en fait plus. Le nazi de chez la maison « chez nazi »... Le type vraiment moche, avec des vraies idées de merde dans la tête.


Au bout d’un moment, l’enflure internationale maniérée, s’enfile un verre de lait qu’il trouve bon, puis allume une pipe déjà bourrée pour accompagner le français qu’il interroge à propos d’une famille de juifs, les Dreyfus... (Le genre de pipe équipée d’un foyer en porcelaine géant qu’on ne voit plus qu’à l’hôtel Thalfried de Rulha). Les Dreyfus (parce qu’il fallait tout de même bien leur trouver un nom...) sont planqués sous le plancher en sapin pendant toute la scène, mais Waltz ne perd pas le nord et détourne le véritable motif de son intervention en racontant une histoire de rats. Où il n’est pas inutile de connaître ce Der ewige Jude (Le juif éternel) un film « documentaire » réalisé par Fritz Hippler et projeté publiquement la première fois le 28 novembre 1940 à l’UFA Palast-am-Zoo de Belin sous la supervision du chef de la propagande nazi Joseph Goebbels. Tout un programme ! Bref ! À a fin du premier chapitre, l’ignoble colonel Hans Landa fait butter tout ce qui grouille à la cave pour être raccord avec le sujet de sa thèse d’éthologie. Un véritable massacre.



Le « luxueux » macaroni nous promène ensuite dans les coulisses de l’histoire à la dérive de la seconde guerre mondiale, en s’appuyant sur l’épisode épique d’un attentat « cinématographique » perpétré contre les plus hauts dignitaires du régime dont le führer en personne. Le crime sanglant est imaginé par une poignée de salopards... les « basterds »... Une bande de juifs légèrement violents, à la drôle de mentalité de vouloir en finir avec le lustre fasciste d’outre-Rhin et sa kyrielle d’abrutis congénitaux qui bandent pour leur chef à la moustache taillée au carré. La bande de vengeurs israélites déjantés est dirigée par John Wayne déguisé en Brad Pitt, mais tout le monde l’a reconnu dans son costume d’hébreu qui lui sert un peu les miches. Passant les détails d’un « ours » vengeur à la batte de base-ball ensanglantée de têtes de boches éclatées... Je me permets d’insister sur la superbe Diane Kruger faisant alors son apparition dans un rade paumé de la Louisiane française quelque part au nord de Paris ; un bar blindé de teutons ivres morts, mais la belle Diane finit quand même par se prendre une balle dans le pied par un Maschinenpistole 40 (plus couramment appelé MP 40 selon les propres codes de la Wehrmacht...) L’auteur du génial Pulp fiction ou de Reservoir dogs nous dévoile-là son excès de fétichisme, son petit faible pour les chaussures de femmes ou les pieds nus en général, une gamme d'orteils de toutes sortes ; une Nike™ jaune qui laisse une marque énorme sur l’écran dans Kill Bill... et maintenant ce talon aiguille oublié sur les lieux d’une tuerie qui perdra la belle Bridget von Hammersmark. J’avais entièrement fini ma glace, terminé de sucer le bâton jusqu’à la sève, alors que débutait un des meilleurs chapitres : la rencontre autour d’un struggle « à la crème » entre l’actrice Mélanie Laurent / Shosanna Dreyfus et ce colonel ss machiavélique dans un grand restaurant parisien. Mais que dire alors de ce morceau de David Bowie (La féline) pénétrant l’image d’une Marlène Dietrich ostensible sur fond rouge dans la scène d’ouverture de l’attentat ?



C’est-à-dire que Tarantino exulte à transformer des codes de série B en pure merveille du cinéma « moderne ». Un cinéma dégagé de toute forme engourdie par le bon sentiment des manières et des styles imposés, les façons engoncées de ne rien déranger en préférant dégueuler des poncifs et chier dans des tas de lieux communs. Bref ce sale gosse élevé aux nanars du vendredi soir prétend n’avoir aucune conscience politique et nous botte le cul avec sa façon grotesque en son royaume d’un Lubitsch dans To be or not to be... Grotesque, baroque, extravagant et au final, plutôt grandiose. Un pied de nez immense adressé à toute la poussière qui n’aurait pas su dépasser le cinéma de Godard.

Inglourious Basterds joue à essayer de sauver l’humanité en organisant le carnage du siècle dans une salle de cinéma parisienne dont on sait qu’il préférât promouvoir l’œuvre considérable d’un Corbeau de Clouzot, fer de lance d’une résistance sincère, à ce film pompier de Georg Wilhelm Pabst, interprété par Leni Riefenstahl, baptisé L'Enfer blanc du Piz-Palü. Un art pompier... comme ce Stolz der nation projeté lors du grand incendie final. Et comment vous dire enfin.. plongé dans le noir des flammes mortelles de l’enfer, ce sentiment d’une œuvre aboutie, unique, l’œuvre d’un génie portée à son apogée.
NÉON™



samedi 29 août 2009

PHOTOMOBILE™ - 123v



LES PHOTOMOBILES™ DE JL GANTNER

(Des images réalisées à partir de son téléphone portable, ses communications régulièrement mises "en ligne". Tout un commerce d'échange et totalement inutile de libres transports avec un vrai mobile d'une bonne marque™ collée sur l'écran. "De l'art moderne" pour ceux qui en douterait, comme on dit aussi "De l'électronique embarquée" ou "De la pression dans un pipe line" )



MESSAGE N°123v


PHOTOMOBILE™ N°123v / JL GANTNER 2009
Message envoyé de Besançon, France
22 août 2009 à 8H53 GMT





LES PHOTOMOBILES™



jeudi 27 août 2009

LE COUP DE CHAUD / XXVII



(ROMAN EN LIGNE)
LE COUP DE CHAUD
-27-



Un roman... et c'est évidemment Tony™ qui s'y recolle ! Sacré Tony ™ ! Un roman... ou une somme de lignes superposées au mouvement de l'air ambiant. Un de ces procédés écologiques pour dire la couleur verte qui lui coule dans les yeux au lieu d'une industrie lourde incapable de le distraire vraiment. Un roman... disons plutôt une correction à la volée d'un vieux manuscrit laissé pour compte par faute de temps, l'été 2003. Le coup de chaud... où ce qui arrive à force de prendre des douches froides au travers du cadre strict d'une météo de merde. Le coup de chaud ou une façon de décliner un paquet d'histoires anciennes, des engrenages, la mécanique rouillée des passions en retard. L'effort illuminé d'en découdre avec ses vieilles leçons de voyages, les malles défaites un peu partout dans le coeur de gens admirables et réconfortants. Le coup de chaud... comme on dirait : de La poésie, le cinéma... un tas d'emmerdements à la fin.


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CHAPITRE 14
LA NUIT DU VINGT AU VINGT-ET-UN JUILLET DIX-NEUF CENT SOIXANTE-NEUF ...

et l’exceptionnel sang-froid d’un homme qui réussit cette manœuvre d’alunissage au jugé dans la poussière sélénite, au lieu de son ordinateur de bord aux neurones encore balbutiants et complètement débordés.



Tony estima la porte d’entrée dans les vibrations d’une idée de meurtre accompagnée d’une plage sonore dans les tons graves. Une musique sourde, composée par la cavalcade de Marie, pieds nus dans la cage d’escaliers ses talons aiguilles à la main, le gémissement rauque de sa robe légère dans l’air suffocant. Tony hésita quelques secondes, entre le petit Jules qui dormait à poings fermés sous l’écran de télévision acheté à crédit chez le marchand de la rue Émile Zola, et l’effet du retour plateau au terme de la séquence d’alunissage de l’Aigle américain dans un fondu au noir parfait.

« Engine arm is off... Houston. Tranquility Base here. The Eagle has landed ».

Finalement —dans une sorte de grand vide mental— Tony pris la résolution de se jeter à son tour dans une descente effrénée du module d’exploration familial avec l’intention de filer au train de sa petite salope de bonnetière jusqu’à sa destination présumée. Six heures et même un peu plus allaient alors s’écouler jusqu’à la première sortie officielle d’un l’astronaute américain sur la surface grise et inerte de la lune. Le temps qu’il faudrait au centre de contrôle à Huston pour checker à distance toutes les procédures de sortie de l’équipage et celles du retour du LEM vers son module de service resté en orbite 15 kilomètres au-dessus de la surface du satellite naturel de la terre. Le temps qu’il suffirait à Jules pour me livrer quelques affinités intellectuelles qu’il avait toujours nourries à propos des passions amoureuses et de l’intérêt qu’elles représentaient dans le grand équilibre des forces en présence. L’idéalisme comme on disait. L’idéalisme comme on dit encore aujourd’hui sous le travestissement d’idées creuses et administratives. C’est comme ça qu’on est venu à Schopenhauer je crois. Une opposition de principe avec Hegel et une franche attirance, l’un comme l’autre pour les poètes latins. Les satyres allusives d’Horace. Horace, l’éclectique, le contorsionniste. Ce commandant de légion, guerrier de la république reconverti dans l’écriture à plusieurs niveaux de lecture. Au fait, qui parle dans les Odes ? peut-être Auguste, Auguste lui-même, certainement. Auguste, et ça change tout.
C’est Jules, sourcils relevés, ses yeux bleus rentrés, qui se lança le premier.

« Ça vous ennuie si je mets du Bach pendant qu’on discute ?...
-Non, Bach, très bien.
-Les variations Goldberg ne vous incommodent pas ? L’enregistrement est celui du 10 juin 1955 à New York, une interprétation un peu hors tempo.
-Glenn Gould, Parfait.

-Le génie de l’homme », commença Jules, s’asseyant à nouveau sur une chaise Palissy Gilles Nouhaillac™ recouverte d’un très élégant velours rose pâle (mais à y réfléchir, peut-être était-ce également un tissu satiné bleu turquoise sur un fauteuil à médaillon réhabilité par le même tapissier très en vogue dans les dernières éditions du Figaro madame... Je dis ça à cause de l’angle dont je me souviens que faisait son bras lorsqu’il parlait, et qui reposait forcément sur quelque chose, comme la manchette capitonnée d’un accotoir. Ma mémoire est assez imprécise dans le cas d’un mobilier moderne combiné à partir des grands styles classiques). Bref ! Je le vis, plaçant subtilement ses mains l’une au-dessus de l’autre contre sa bouche dans une position de total relâchement. « Le génie de l’homme, comme l’affirme la théorie schopenhauerienne de l’évolution, consiste à nous masquer le véritable but de nos inclinations amoureuses en ce qu’elles instrumentent nos choix et nos combinaisons psychiques et sensorielles dans le seul dessein de mieux nous perpétuer dans l’existence. Un simple masque posé sur cet instinct sexuel dédié au programme de survie de l’espèce. Voilà la seule, l’unique vérité rigoureuse face à ce que nous croyons si souvent reconnaître de sublime, de consubstantiel et d’épuré dans l’acte d’amour parfait : le système de moralité individuelle idéal qui oriente l’être dans son besoin d’indéterminisme et de liberté. L’amour comme une belle et tragique aberration dont l’homme se rend lui-même esclave par sa propre volonté d’insoumission à la cause générale. Comprenez bien. De la sorte et convaincu de spéculer pour son seul intérêt, sa jouissance narcissique, l’égoïste en réalité —puisque qu’il faut bien d’une certaine manière nommer cet être-là, tout à fait individualiste—, tombe ainsi à genou sans le savoir devant le programme général le plus élémentaire, celui, primitif de la perpétration. Un parti commun, universel, ancré au plus profond des êtres depuis le commencement, et qui accouche en l’être moderne du plus subtil subterfuge romanesque, du plus raffiné des théâtres pour arriver à ses fins. Toute cause privée satisfait en réalité un intérêt qui la dépasse de beaucoup. C’est en tout cas l’esprit de la conclusion apportée par le philosophe allemand sur le sujet principal de la volonté. Où le vaniteux... —et pardonnez-moi cette légère digression— dont il faudrait aussi beaucoup parlé, ne se rend pas compte de l’état de subordination dans lequel il se trouve plongé, alors qu’il baigne justement dans l’illusion de son total libre-arbitre. Dans sa métaphysique de l’amour, Schopenhauer écrit : « Aucun thème ne peut égaler celui-là en intérêt, parce qu’il concerne le bonheur et le malheur de l’espèce, et par suite se rapporte à tous les autres […] »

- Quant à l’amour, je vous suis parfaitement, mais ça ne remet pas forcément en cause ce postulat dont nous parlions juste à l’instant, et qui visait d’abord à constater les nombreuses incongruités relevées dans l’expédition américaine sur la lune de juillet soixante-neuf.
-Non, pas d’emblée. Ou plutôt si justement, si l’on accepte ce génie qui nous occupe ici, cette disposition physiologique initiale... comme une tare naturelle propre à nous mystifier en toutes circonstances ».

Je n’en revenais pas. Je demandai alors à mon interlocuteur s’il acceptait de pousser un peu plus loin cet exercice d’élucubration intellectuelle à propos de la mission Apollo 11 et du corpus d’informations disponibles concernant l’ensemble des voyages lunaires effectués par la NASA au cours du début des années soixante-dix. Jules acquiesça, certainement à cause de son penchant pour toutes les discussions théoriques. « Par pur esprit de contradiction » rajouta le fils Chaumont.

« Croyeriez-vous donc ! » décochais-je alors dans une sorte de provocation calculée « comme seuls quelques fous tentent de nous en convaincre depuis ce Bill Kaysing et ses spéculations notoirement farfelues, que cette formidable aventure humaine pu être aussi une... escroquerie ?
-La plus grande escroquerie qu’il puisse s’imaginer, me répondit-il sans se défaire le moins du monde. Oui, l’arnaque des arnaques. Et si vous y teniez, je saurais vous en donner la preuve à l’instant même. »
-Soit ! » lui répondis-je, non sans une certaine grimace de jubilation. « Je suis vraiment curieux d’entendre ça ». Jules... (qui avouait encore il y a un instant en marmonnant : ne même plus réussir à se souvenir du nom exact de tous les protagonistes, de cette ballade historique aux confins possibles de notre monde en proie aux pires obsessions !!!...) « Et bien allons-y, poursuivis-je. Tiens, commençons alors par la séquence d’alunissage à proprement parlé ; la descente du LEM et la sortie de l’équipage sur la mer de la tranquillité... Vous voulez donc dire que tout ça n’a jamais eu lieu, que tout le monde a rêvé ? qu’environ un demi milliard de téléspectateurs à l’époque, auraient toutes été victimes d’une gigantesque hallucination collective ? » J’avais d’emblée saisi l’opportunité d’interroger Jules sur le point capital de ces six heures et vingt minutes de pause dans la retransmission en direct de la mission lunaire... envisageant que mon témoin privilégié se souviendrait peut-être de quelques détails, non pas de son propre souvenir, mais dans l’espoir que Tony lui-même, sa mère ou n’importe qui aurait pu le renseigner à posteriori sur les événements qui s’étaient déroulés cette fameuse nuit du 20 au 21 juillet 1969, entre le moment où le module d’exploration s’était posé et l’image historique de Neil Amstrong posant le pied pour la première fois sur le sol lunaire.


(À SUIVRE)






dimanche 23 août 2009

CÉDRIC BOUTEILLER



PORTFOLIO


Cédric Bouteiller est photographe plasticien ou plutôt peintre, carrément graphiste... (c'est comme vous préférez !) Né en Provence en 1970. inspiré par le travail du peintre catalan Tàpies et une rencontre avec l'artiste franco-chinois Zao Wou-ki. Technique mixte utilisant des photographies sur aluminium et des superpositions de matériaux divers. (collages, peinture) L'ensemble sur des formats d'environ un mètre carré.


















VOIR LE SITE DE CÉDRIC BOUTEILLER



LE COUP DE CHAUD / XXVI



(ROMAN EN LIGNE)
LE COUP DE CHAUD
-26-



Un roman... et c'est évidemment Tony™ qui s'y recolle ! Sacré Tony ™ ! Un roman... ou une somme de lignes superposées au mouvement de l'air ambiant. Un de ces procédés écologiques pour dire la couleur verte qui lui coule dans les yeux au lieu d'une industrie lourde incapable de le distraire vraiment. Un roman... disons plutôt une correction à la volée d'un vieux manuscrit laissé pour compte par faute de temps, l'été 2003. Le coup de chaud... où ce qui arrive à force de prendre des douches froides au travers du cadre strict d'une météo de merde. Le coup de chaud ou une façon de décliner un paquet d'histoires anciennes, des engrenages, la mécanique rouillée des passions en retard. L'effort illuminé d'en découdre avec ses vieilles leçons de voyages, les malles défaites un peu partout dans le coeur de gens admirables et réconfortants. Le coup de chaud... comme on dirait : de La poésie, le cinéma... un tas d'emmerdements à la fin.


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CHAPITRE 13
L'APOTHICAIRE
(SUITE 2)




Jules m’avait convaincu d’un tas de rapports de cause à effet entre sa propre vie, son histoire tragique, la musique sombre qu’il écoutait en sourdine durant ses longues séances de méditation, et la piètre qualité de l’air qu’on respirait tous au même moment dans l’atmosphère surchargée ; une certaine idée du chaos.

Je lui avais répondu mon intention de ne rien refuser en bloc. Ni chapelle, ni aucun sentiment figé de ma part... Paradoxalement, je lui avais expliqué mon progressisme en berne, mon sens du mouvement interrompu. Bref ! de tout ce que je pensais de mes noces damnées avec l’agitation ambiante ; de mon temps de retard sur l’âge des ondes cosmiques ; du chant des sirènes, dilué dans la grande marre de merde dans laquelle on était censé nager.

Et puis je ne sais plus ce qui nous a ramené à la couleur des fleurs et à l’origine du nom des roses modernes ? Jules dressa l’inventaire rigolo du genre d’espèces qu’on trouvait facilement sur les marchés ou sur les catalogues de vente par correspondance spécialisés. Cette « Queen Elisabeth » par exemple. Ou la « Betty Boop », la « Commandant Cousteau », l’ « Audrey Hepburn », la « Tchang Kaï-chek » ; la « Lili Marlène », la « Princesse de Galles » ou la « Freddie mercury »... Toutes génétiquement modifiées. Mais Jules disait préférer le cas rustique d’une « Sombreuil(X) », le plus beau des thés grimpants blanc (malheureusement stérile).

-X- Cette rose tire son nom de celui du Marquis de Sombreuil, maréchal de camp, héro de la bataille de Rocourt et guillotiné à Paris en 1794.

J’avais profité de cette aubaine d’un champ de fleurs propice au calme et à la sérénité pour lui faire part d’un tableau dont j’avais pris connaissance et qui recensait la fréquence des anxiétés maladives réparties dans la population générale. La peur des animaux, la peur du noir ou des orages, la peur d’être seul, celle de rester enfermé ; la peur du vide, la phobie des hauteurs... la peur du jugement des autres ou d’avoir un malaise en public ; la peur, encore, de faire une attaque au volant, de mourir seul loin de chez soi... (Sur quelques milliers de personnes interrogées, on en recensait près de la moitié susceptible d’éprouver le sentiment d’une peur excessive à propos d’un objet ou d’une situation. En réalité, un simple dérèglement du seuil d’alarme face au danger. Alors que pour 10% des gens, cette peur — influencée par un héritage génétique familial augmenté du poids d’un traumatisme sévère — relevait cette fois d’une véritable pathologie d’angoisse pouvant aller jusqu’à l’apparition de troubles panique invalidants). Un comportement d’évitement... La couleur des fleurs, le marquis de Sombreuil, Clouscard, le marxisme, Hegel, Rousseau, les rosiers grimpants ou la poésie d’Arthur Rimbaud... Comment n’avais-je pas fait le rapprochement plus tôt ? Une stratégie pour se protéger des réactions d’angoisse majeures. Une somme d’éléments imbriqués dont Jules s’assurait la protection contre ses idées noires, sa peur du vide, sa sensation d’étouffement. Jules avait tout de même fini par m’avouer cette détresse en forme d’une peur irraisonnée de perdre un jour le contrôle de soi ou celle, plus terrible encore de carrément devenir fou. Un sentiment fréquent chez les personnes phobiques ou atteintes de troubles obsessionnels compulsifs. Comment n’avais-je pas réussi à identifier plus tôt toutes ces questions métaphysiques qu’il se posait sans cesse ; son besoin d’ordre et de symétrie « ce maniaque » dont parlait Vanessa... « Un vrai con ! » Et puis cette incapacité à jeter quoi que ce soit (syllogomanie), le moindre souvenir affectif... tout ce qu’il conservait de sentiments précieux dans des emballages de papier kraft vergé brun et biodégradable ; ces tics, cette manie de se ronger les ongles jusqu’au sang et de bouger les genoux lorsqu’il s’impatientait sans raison valable...


(À SUIVRE)





vendredi 14 août 2009

PHOTOMOBILE™ - 259



LES PHOTOMOBILES™ DE JL GANTNER

(Des images réalisées à partir de son téléphone portable, ses communications régulièrement mises "en ligne". Tout un commerce d'échange et totalement inutile de libres transports avec un vrai mobile d'une bonne marque™ collée sur l'écran. "De l'art moderne" pour ceux qui en douterait, comme on dit aussi "De l'électronique embarquée" ou "De la pression dans un pipe line" )



MESSAGE N°259


PHOTOMOBILE™ N°259 / JL GANTNER 2009
Message envoyé de Besançon, France
11 août 2009 à 12H46 GMT





LES PHOTOMOBILES™


LE COUP DE CHAUD / XXV



(ROMAN EN LIGNE)
LE COUP DE CHAUD
-25-



Un roman... et c'est évidemment Tony™ qui s'y recolle ! Sacré Tony ™ ! Un roman... ou une somme de lignes superposées au mouvement de l'air ambiant. Un de ces procédés écologiques pour dire la couleur verte qui lui coule dans les yeux au lieu d'une industrie lourde incapable de le distraire vraiment. Un roman... disons plutôt une correction à la volée d'un vieux manuscrit laissé pour compte par faute de temps, l'été 2003. Le coup de chaud... où ce qui arrive à force de prendre des douches froides au travers du cadre strict d'une météo de merde. Le coup de chaud ou une façon de décliner un paquet d'histoires anciennes, des engrenages, la mécanique rouillée des passions en retard. L'effort illuminé d'en découdre avec ses vieilles leçons de voyages, les malles défaites un peu partout dans le coeur de gens admirables et réconfortants. Le coup de chaud... comme on dirait : de La poésie, le cinéma... un tas d'emmerdements à la fin.


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CHAPITRE 13
L'APOTHICAIRE
(SUITE 1)




Le procès verbal d’inventaire faisait état d’un nombre considérable d’indices concordants dont je tente ici de vous reproduire la liste (X) de mémoire :

UN THERMOMÈTRE ÉMAILLÉ DE COULEUR JAUNE, UN BAROMÈTRE FAISANT AUSSI HYGROMÈTRE ; UN APPAREIL PHOTOGRAPHIQUE DE MARQUE LEICA™ (M6 - N° 1674362), UN OBJECTIF 2.8/50MM ELMAR ; 6 ROULEAUX DE PELLICULE VIERGE KODAK TRI X 100 ASA 36 POSES ; UN AGRANDISSEUR DE MARQUE SHARPIO-RHENEL™, UN JEU DE FILTRES DE COULEURS GRADUÉS, UN MASSICOT FORMAT 30X40 ; UN CUTTER ET PLUSIEURS PAQUETS DE LAMES DE RECHANGE ; UNE BOITE DE PEINTURE LEFRANC™ (UNIQUEMENT COMPOSÉE DE COULEURS PRIMAIRES ROUGE, VERT, BLEU) ; UN ENSEMBLE ASSEZ IMPORTANT D’ERLEN-MEYER, DE BECHERS, DE BOÎTES DE PÉTRI ET DE TUBES À ESSAI DE FORMES ET DE CONTENANCES DIVERSES, DONT UN VASE EN VERRE TRANSLUCIDE ET DE TRÈS GRANDE TAILLE, COURONNÉ D’OR À SON ENCOLURE ; UN ÉLECTROLYSEUR, UN STÉRILISATEUR, UN CALORIMÈTRE ; UNE LAMPE CONVERTIBLE À INFRA ROUGE OU ULTRA VIOLETS ; UNE PAIRE DE CISEAUX, 6 TUBES DE COLLE UNIVERSELLE ; UN PIOLET D’ALPINISME EN ACIER FORGÉ DE MARQUE CHARLET-MOSER™ FABRIQUÉ À CHAMONIX (HAUTE-SAVOIE) TAILLE 45cm, UN PITON CORNIÈRE DE FABRICATION CALIFORNIENNE (APPELÉ PITON AMÉRICAIN), UN DUVET ROUGE ; TROIS SACS EN TOILE DE JUTE CHARGÉ DE PIERRES, UN QUATRIÈME SAC REMPLI D’UN MÉLANGE DE TERRE ET DE DIFFÉRENTES MATIÈRES VÉGÉTALES EN DÉCOMPOSITION ; UNE SCIE À GRECQUER, UN RACLOIR, UN JEU DE PINCES À BOUTURER, 12 SIGNETS EN BOIS, 6 PELOTES DE SISAL; UN CALENDRIER DE SEMIS LUCIEN CLAUSE ; UN PETIT ALAMBIC (MODÈLE ASSEZ ANCIEN) ; UN RÉCHAUD À ESSENCE COLLMAN™ ET 3 RECHARGES ; UN MICROSCOPE, UN ASTROBALE ORIENTAL ; UNE LUNETTE ASTRONOMIQUE 300X FREHEL, UN CURVIMÈTRE (MODÈLE SUISSE), UNE BOUSSOLE (FONCTIONNANT DANS LES DEUX HÉMISPHÈRES) ; UNE REPRODUCTION D’ENLUMINURES REPRÉSENTANT LA DESTINÉE DE L’ÂME SELON LE MODÈLE D’ÉTAGEMENT DES SPHÈRES PLANÉTAIRES DE PTOLÉMÉE, UNE AUTRE, REPRÉSENTANT UNE GRAVURE DE DÜRER INTITULÉE « MÉLANCOLIA » ; UN HERBIER DE FLEURS SAUVAGES ANNOTÉ À LA MAIN ; UNE COLLECTION DE PAPILLONS EXOTIQUES DONT UN MORPHO REMARQUABLE ÉPINGLÉ À L'INTÉRIEUR D'UNE BOITE D'EXPOSITION ; UN LIVRE RELIÉ CUIR DE TRÈS BELLE FACTURE ET ILLUSTRÉ PAR BOTTICELLI, INTITULÉ « LA DIVINE COMÉDIE » ; UNE COLLECTION COMPLÈTE DE PARIS MATCH (QUELQUES NUMÉROS DÉCOUPÉS), UNE AUTRE EN LANGUE ANGLAISE DU NATIONAL GÉOGRAPHIC ; UN LIVRE INTITULÉ « L’AMATEUR D’ABÎMES » DE SAMIVEL, UN AUTRE INTITULÉ « TRISTE TROPIQUE » DE C.L. STRAUSS ; UN AUTRE ENCORE, INTITULÉ « L’ESQUISSE D’UN TABLEAU HISTORIQUE DES PROGRÈS DE L’ESPRIT HUMAIN » DE CONDORCET ; UN RECUEIL DE POÉSIES DE PAUL VERLAINE DANS LA PLÉIADE ; UN AUTRE D’ ARTHUR RIMBAUD DANS UNE SIMPLE ÉDITION DE POCHE ; UN LIVRE DE PHOTOGRAPHIES, INTITULÉ : « PHOTOGRAPHIES D’HCB », ENCORE UN AUTRE INTITULÉ : « HCB PHOTOGRAPHE » ; UNE ENCYCLOPÉDIE DE BIOLOGIE TOUTE NEUVE, ET PUIS « HISTOIRE DE L’ART » DE E.H. GOMBRISH ; « LE CONTRAT SOCIAL » DE ROUSSEAU, LA « FRENCH THEORY » DE FRANCOIS CUSSET, « LES FRAGMENTS D'UN DISCOURS AMOUREUX » DE ROLAND BARTHES, « GODARD PAR GODARD » AUX ÉDITIONS DU CAHIER DU CINÉMA, UN DICTIONNAIRE (LES DEUX VOLUMES DU « ROBERT » ) TRÈS USAGÉS ; LES 7 TOMES ÉDITÉS CHEZ GALLIMARD D’ « À LA RECHERCHE DU TEMPS PERDU » DE MARCEL PROUST ; « ULYSSE » DE JAMES JOYCE EN ÉDITION DE POCHE ; « LES PARTICULES ÉLÉMENTAIRES » DE MICHEL HOUELLEBECQ ; « LE TESTAMENT À L’ANGLAISE » DE JONATHAN COE ; UN PLAN DU MUSÉE DU LOUVRE, UN AUTRE À L’ÉCHELLE 1/25000e DES ENVIRONS DE BOUILLY DANS LE DÉPARTEMENT DE L’AUBE ; UN ENREGISTREMENT DE « MADAME BUTTERFLY » DE PUCCINI, SUIVI D’UN AUTRE DE « PINK FLOYD », L’ENSEMBLE RÉUNIS SUR UNE BANDE MAGNÉTIQUE D’UN DEMI POUCE (12.7 mm) TOUT À FAIT HORS D'USAGE ; UN DISQUE 33 TOURS DE JOHN LENNON ET YOKO ONO RETIRÉ DE LA VENTE EN 1968 À CAUSE DE SON CARACTÈRE PORNOGRAPHIQUE ; UN AUTRE INTITULÉ : « DANGEROUS », INTERPRÉTÉ PAR MICHAEL JACKSON ET RANGÉ DANS UNE POCHETTE RÉALISÉE PAR LE PEINTRE MARK RYDEN ; LE FILM « CAPRICORN ONE » DE PETER HYAMS EN VHS ; UN BRACELET FÉMININ EN FORME DE SERPENT QUI SE MORD LA QUEUE TAILLÉ DANS UN MÉTAL BLANC ; UNE ROSE SÉCHÉE SOUS UN GLOBE TRANSPARENT ; HUIT FLACONS DE PARFUMS HERMÈS ; UN BILLET DE TRAIN (UN ALLER SIMPLE PARIS-TROYES) ; UNE ROBE DE MARIÉE ET UNE PAIRE D’ESCARPINS AUX TALONS TRÈS EFFILÉS DANS UNE BOITE A CHAUSSURES REMPLIES D’UNE CORRESPONDANCE AMOUREUSE ASSIDUE ; UNE BOUTEILLE DE « BUSHMILL » ; PLUSIEURS BOITES DE CACHETS D’ASPIRINE RENFERMANT EN RÉALITÉ DES COMPRIMÉS DE LEXOMIL™...

-X- La liste retranscrite exactement dans l’ordre ou son fac-similé m’est parvenu, est fort longue et ne saurait faire ici l’objet d’une description exhaustive. Aussi, permettez-moi de vous réclamer votre confiance totale en tant que je puis vous assurer de ma bonne foi et de ma parfaite honnêteté concernant le témoignage que j’apporte dans le respect du document original. Profitant de l’instant pour tout de même vous préciser le cadre strict de ma prestation dans l’obligation de réserve qui m’est imposée par tous les ayants droits. Vous rappelant, oui, que de ce qu’en vertu de mon autonomie d’auteur défendue par le droit inaliénable à son libre-arbitre, il m’appartient en conséquence, de décider de ce qu’il me sied de consentir à vous livrer tout ou partie des éléments constitutifs de l’intrigue ; de même que je ne saurais déroger à l’usage de mon pouvoir souverain dans l’acte de vous instruire sur la chronologie des faits et dans le calendrier qu’il me convient de vous les exposer.

Jules disait ne plus se souvenir du moment exact où tout avait commencé entre son père et sa mère, déclenché par les lettres d’Antoine, mais pas seulement. « Quant à cet alunissage... Cet exploit de deux astronautes américains dont j’ai même oublié le nom. Amstrong et l’autre, comment vous dites déjà ?... Aldrin c’est ça ! Que voulez-vous que je vous dise ?... C’était il y a longtemps et je vous répète que je n’avais peut-être que quatre ou cinq ans à l’époque, et franchement, je ne crois pas que ce soit très important ! »
J’avais fini par relâcher mon premier sentiment d’angoisse sur l’accotoir d’un fauteuil Louis XV en trompe-l’œil or et violet où mon hôte avait proposé que je m’installe en acceptant de prendre un café avec lui, juste sous une photographie en noir et blanc. La photo de cette fille, cette jeune danseuse... dont l’allure concentrait toute mon attention au centre du cadrage. « Vous aimez ? » Jules m’affirma détester la couleur sur les photos. « Peut-être à cause de sa nature instable, son caractère subjectif. Peut-être, oui, à cause de cette propriété physique hallucinante d’être et autre chose à la fois ?! d’être un corps, une somme de particules associées, et juste son interprétation aléatoire en même temps. Un spectre, un simple fantasme... » Chaumont... Je ne savais pas trop quoi penser à propos de ce type au nom bizarre, un nom de ville... Ce Jules Chaumont que tous m’avait dépeint comme une sorte de malade mental, un demeuré. La pire espèce de dégénéré.

Nous avions parlé près d’une après-midi entière, d’abord de sa mère... puis, par extension, de ce sociologue et philosophe Michel Clouscard, très imprimé dans la pensée d’un écrivain génial comme Houellebecq dont la société se moquait sans jamais l’avoir lu vraiment. Sa version d’une anthropologie de la modernité, toute consacrée selon lui, à la destruction des grands récits collectifs au profit de l’essor des fantasmes individuels. Michel Clouscard, qui aura permis à l’ontologie d’un marxisme « premier » (dédogmatisé...) d’accoster sur ce quai fleuri d’une idée post-rousseauiste plutôt brillante au demeurant. Un hégélien... Une sorte d’alchimiste en réalité, qui aura tenté toute sa vie, l’improbable dilution d’un Hegel et d’un Rousseau dans le bain primordial d’un Karl Marx ! De la dialectique à l’état pur. De la dialectique au sens ou Hegel justement.... faisait pour une part correspondre cette notion à celle du scepticisme (l'art de dissoudre les opinions dans le néant). Au final, un idée molle : La tentative d’un combat contre l’Eros libéral et la bureaucratie stalinienne, vaste programme, oui... contre la dictature du marché et celui du prolétariat par la voix du praxis. L’Ulysse du praxis, en sa mère moderne, intranquille, post-soixante-huitarde que le docteur d’état en sociologie nomma lui-même libérale-libertaire et néo-fasciste. Cette idéologie du désir frivole et vulgaire, de liberté de mœurs qu’il fustige comme forme débarquée du capitalisme sauvage pour le nourrir en retour... gavé la bête... de jouissance sans entrave.

Poursuivant sur le terrain de nos réflexions communes, l’un et l’autre approuvions aussi l’idée qu’un certain dolorisme fut également nécessaire à l’élaboration d’un plan de bonheur utile à la vie des gens pour accorder l’orchestre de nos libertés individuelles, et par opposition à quelque spinozisme en la matière. Oui À tout malheur est bon selon la célèbre théorie de la vitre cassée et du vitrier qui s’en réjouit. Un simple « sophisme » répond une petite société bourgeoise bien-pensante. Et comme je la comprends aussi. Oui, comme je comprends l’intention des mieux lotis (quelques rares privilégiés, omniscients, omnipotents... omniprésents du centre jusqu’aux marges), de ne point vouloir disserter de leur insupportable confort à l’aune de toutes les misères du monde. Comme j’admets l’épreuve (les preuves) trop douloureuse, intolérable pour qui n’est pas familier des blessures profondes ; pour qui n’est pas coutumier de la violence arbitraire, des fêlures... comme celle d’une enfance bousculée... des grands amours chavirés. Mais voilà que je m’égare encore... (cette forme de résilience et ses champs électriques irisant... Une véritable désolation). Oui, encore une fois... À toute chose... malheur est bon. De Baudelaire à Rimbaud... Des rescapés d’Auschwitz-Burkenau, Sobibor, Belzec, Treblinka... Ceux du Goulag ou du Laogai, Long Kesh... Banja Luka, Omarska... Les victimes des milices Interahamwe ou Impuzamugambi... Les gosses de tous les camps, de toutes les sortes de ghettos ; les rejetons de tous les pères défaillants ; de toutes les mères inaptes... Ceux de toutes les politiques d’extermination du monde sensible... Oui, comment faire ? sinon d’apprendre à extraire du noir, la couleur... l’effluve magique des arcs-en-ciel. Un tas de mineurs de fond à l’ouvrage de leurs singulières métamorphoses. Des habitants de la transcendance, des chercheurs d’oxymores, des poètes... Des vendeurs de richesses inouïes. Des survivants... Des suspects.

« Mais je ne suis pas un spécialiste vous savez... Je me contente seulement de résister au bruit des lanternes, au chuintement des lampions... au tintamarre de la plèbe. Le tout à ma manière et dans le strict respect de mes illusions passées. Rien de plus. Au reste, je tiens mon école des rues sombres et des marais fiévreux, comme Rimbaud lui-même (encore lui...) — et pardonnez-moi par ailleurs cette obscène tentative de rapprochement — Oui, comme Rimbaud rapporte avoir conquis ses connaissances historiques dans les celliers, tout autant qu’il dit avoir été averti sur les sciences classiques dans quelque vieux « passage » parisien. J’ai bien cherché ces « passages » à travers le plan de ces Illuminations. J’ai cherché dans ses « gouffres d’azur » et ses « puits de feu ». Lui, le « maître du silence » sur ses « sentiers âpres » ; ce Rimbaud, capable de « fixer ses vertiges ». Oui, je vous assure que j’ai tout exploré depuis ses « égouts » et jusqu’à son « salon souterrain » seul vestige de son enfance évanouie. Mais nous parlions de ma mère n’est-ce pas ? »

À SUIVRE







samedi 8 août 2009

PHOTOMOBILE™ - 226



LES PHOTOMOBILES™ DE JL GANTNER

(Des images réalisées à partir de son téléphone portable, ses communications régulièrement mises "en ligne". Tout un commerce d'échange et totalement inutile de libres transports avec un vrai mobile d'une bonne marque™ collée sur l'écran. "De l'art moderne" pour ceux qui en douterait, comme on dit aussi "De l'électronique embarquée" ou "De la pression dans un pipe line" )



MESSAGE N°226


PHOTOMOBILE™ N°226 / JL GANTNER 2008
Message envoyé de Besançon, France
27 juillet 2008 à 15H22 GMT





LES PHOTOMOBILES™


vendredi 7 août 2009

MONT VENTOUX


TOUR DE ROUES ESTIVAL


IMPRESSION PROVENCALE
L’EFFORT... À VENTOUX





« Il faut des monuments aux hommes » a écrit Victor Hugo « autrement où serait la différence entre la ville et la fourmilière. » Voilà l’idée, l’allégorie qui commande à la peine, règle l’effort consenti mètre après mètre, sur la route qui s’élève vers le ciel provençal à une redoutable moyenne de 10%. Une ligne parfaite, un tracé mythique depuis le village de Bédouin dans le Vaucluse, sur le dos d’un géant, un pape. Oui, « un monument », malgré ses 1912m d’altitude, malgré sa hauteur modeste pour un pilote d’aérostat, son statut de simple renflement pour un alpiniste. Le Mont Ventoux, point culminant du massif des Baronnies, toit de la région de Provence, légende parmi toutes des grandes ascensions dans la matière des épreuves cyclistes de classe internationale. Un kilomètre et demi de dénivelé positif d’un seul événement, d’une seule forme compacte, absurde pour toute autre discussion de géographie ; une erreur philosophique, selon la question du moindre effort ou du grand appareillage préférable de la ligne droite, de la science idéale du chemin le plus court... Voilà l’institution, la cathédrale de l’escalade cycliste plantée dans ses baumes comme une relique dans son cœur d'église. Le Mont Ventoux et sa tête de centenaire, son caillou blanc vissé sur son amas visible depuis Cavaillon, Carpentras, ou Montélimar ; ce crâne de héros érodé. À regarder le tableau en été dans l’éloignement de la vallée du Rhône, la proéminence baignée de lumière affable exhibe un fondu d’aquarelle bleu de saule et vert fané comme une peinture assez fourbe d’arrière-plan, un simple décor... pour épauler, soutenir une nuée insolite, une tumeur blanche, une enflure argentée, l’authentique sujet pourtant, d’une bosse de calcaire infernale. La véritable entreprise se déroule sur le versant méridional. Une pente boisée, douce à la vue et paradoxalement la route la plus raide. La D974 (dite de l’observatoire) s’attaque par le jaune sec et le bleu mauve, le vert basilic et les brume bleue, le brun miel de la terre craquelée sous des pieds alignés de Grenache, de Chardonnay, de Merlot... un lavis propagé entre les combinaisons de toits de tuiles roses et ocrées.


À VENDRE : SELLE TOUTE NEUVE, JAMAIS SERVIE...

La première navigation se fait à vue, à partir des derniers platanes et les premiers traits de garrigue conduisant au virage de Saint Estève. « L’œuvre » d’un « Ventoux » prend corps à ce point, passé de 500 mètres d’altitude et à près de 1400 mètres du sommet. L’ouvrage... construit pièce par pièce depuis Malaucène, Vaison-la-romaine ou plus loin pourquoi pas Nyons ou Visan... au choix de la dérive... ou à la logique des circonstances. Les premiers plis du colosse s’appréhendent dans les contrastes des rosées matinales et juste avant qu’elles n’expirent dans les volutes de chaleur étouffante. Oui, comme l’alpiniste franchit les premiers degrés dans ses propres reliefs intérieurs au jour naissant. Le résultat d’une longue préparation, le bilan de plusieurs mois d’entraînement rigoureux, et ce pour ne rien concéder de cette aliénation nécessaire au résultat escompté. Point d’espoir à ce jeu pour l’orgueilleux, le vaniteux... il s’agit ici de ne rien attendre d’une quelconque suffisance étalée en système pour garantir ses privilèges. Non, point d’usurpateur invité à prospérer en cette maison naturelle de la vertu. C’est d’ailleurs là la belle affaire d’un jeu où le hasard ne tient aucun rôle ; ni le hasard, ni le sou, ni la combine et ni l’étage social d’où certains préféreraient s’élancer... non, seulement cette vertu d’humilité et cette aptitude à l’abnégation. C’est donc dans ce type d’état d’esprit que je dus m’élancer ce 28 juillet 2009 à l’assaut de cette diablerie géographique, l’orchestre d’un tout récent Tour de France™ comme une petite musique de fond, pour accompagner les premiers tours de roues dans l’engrenage d’une simple compétition avec soi-même. Oui, la rencontre, le match, le plus noble qu’il soit. 21 KM de montée et dans un des pourcentages, un des plus sévères qu’il puisse se trouver sur une distance aussi importante. 1610 mètres au total depuis Bédouin.


À L'ENDROIT DU COL DES TEMPÊTES 1848M

Une escalade à réaliser au rythme, au tempo... (lorsque je vous parlais d’une musique d’orchestre...) Pour les spécialistes : un 39/25. C’est-à-dire de quoi réussir à tourner un peu les jambes au lieu de rester collé au bitume dans une confrontation sans issue. Une bataille à mort entre soi et la chose déroutante du vide qui vous tire franchement vers le bas. Cet effet de treuil inversé, le corollaire maudit de quelques lois naturelles infernales conviées à la fête. Nous voilà donc à pied d’œuvre, à destination de la lutte mythique ; sur le point du grand concours déclenché contre votre propre masse, votre seule inertie. Une lutte à la régulière entre les effets de la pesanteur générale et votre propre ego. Voilà l’intrigue, l’objet de la cabale. Un dernier virage en pleine lumière sur l’adret et dans l’odeur de thym, avant d’entamer le décor de pins d’Alep, celui des chênes verts, des cèdres, de l’aubépine et du genévrier ; là où la pente se durcit. Une course sous voûte d’environ 10 KM depuis Saint-Estève jusqu’au lieu-dit du chalet Reynard. Une forêt enchantée forcée d’un long ruban noir criblé de machines de toutes sortes et pilotées par des aventuriers de toute acabit. Pris d’en haut, depuis l’angle parfait du surplomb, l’ensemble dessinerait une armée de fourmis rangées en colonne ; le strict effet géométrique du cortège ou de la procession. (Où j’évoquais cette « ville » convoquée par Victor Hugo, et cette « fourmilière... » qu’il mentionnait, par opposition !) L’idée qu’un effort de cette sorte, consenti par l’homme social et tout à fait émancipé, rapprocherait là son statut de celui de la bête qui sommeille encore en lui. Au détail près peut-être, que l’animal ne connaît pas d’effort gratuit, ni cette délectation du jeu qui consiste à se dépasser soi-même à l’aune un peu folle de nos passions passagères. Mais voilà que je m’égare en chemin de ce toit provençal dont je vous avais promis le calvaire jusqu’à son faîte. Ce chalet Reynard, donc ! Où j’arrive enfin. L’odieuse architecture touristique comme il en est mille, répandues sur les flancs alpins où les rives balnéaires modernisées... L’endroit d’un virage assez large en forme de parking d’aspect vraiment grossier, où la pente et pour la première fois depuis l’attaque, s’abaisse prudemment sur une centaine de mètres avant la rampe finale. Gradin scélérat du théâtre de souffrance qui s’ouvre dorénavant dans l’air vif et raréfié des altitudes alpines. 6 kilomètres encore, L’attraction terminale dans le pire des décors lunaire.


LE COL DES TEMPÊTES, PROCHE DU SOMMET DU MONT VENTOUX 1848M

Une écharpe de bitume coule, bien visible sur l’épaule sélénite de la montagne chauve. Un dernier escarpement dessiné dans la pierre nue de l’étage sommital. Voilà l’ultime combat, une pente « héroïque », le fameux « monument » à son comble, 1000 mètres au-dessus de ses larges fondations mistraliennes. Je dis ça pour l’accent bien sûr, le trait de caractère du célèbre paysage, mais surtout pour le vent, l’air en rafales, le blizzard qui joue dés lors à flinguer les corps éreintés, arc-boutés sur leur engin de miséricorde. Un mistral dont on dit qu’il peut souffler quelquefois jusqu’à interdire catégoriquement l’accès au sommet. 500 mètres encore... sur une échelle verticale qui en compte moitié plus mitraillant les mollets et les cuisses. Une succession de lignes droites à 7 ou 8% aux difficultés progressives, coupées de quelques virages définitifs resserrés au-dessus du vide jusqu’à l’endroit de la stèle dédiée au coureur britannique Tom Simpson, mort juste sous le col des Tempêtes lors du Tour 1967. Une tragédie. Les premiers mouvements de lèvres de travers dans la grande presse à propos de la professionnalisation du sport à outrance et puis plus rien. Ou si peu ! Le silence consenti juste après, l’omerta. Le suicide inavoué de plusieurs générations d’athlètes de haut niveau, méthodiquement conditionnés à garantir la pérennité du spectacle à dessein de son économie légitime dont ils profiteront finalement si peu eux-mêmes en comparaison d’autres rouages sans scrupule. J’entends maintenant la cloche sonner l’ultime épingle après tout juste 1 heure et 45 minutes d’effort de réflexion. Un mur, sous la tour émettrice et son allure de totem extravagant dressé à la mémoire des Merckx, Virenque, Bernard ou Pantani... L’histoire se fige, la messe est dite ; le temps, arrêté dans le geste solennel d’un ultime coup de pédale sur la pointe des pieds pour ne rien déranger de l’occupation commerciale ambulante. L’instant de souffler, de reprendre conscience, de dissiper la fièvre du succès dans l’ombre de l’obélisque de style quasi Bauhaus qu’une simple antenne de télévision surmonte sous l’apparence d’un tuyau d’échappement dressé, rouge, vers l’empyrée. Le « monument » ridicule, d’une fusée bandée au sommet, comme parabole peut-être d'un certain degré d’ambition virile déplacée.


L'ÉMETTEUR DU MONT VENTOUX (DEPUIS LE VERSANT SUD)

Un piédestal. Et pour reprendre le grand homme de lettres et des « choses vues » qui m’a suivi tout du long de ces 21 kilomètres d’arrogance physique et spirituelle, « Un piédestal, dit Victor Hugo, cet espace étroit et honorable, avec quatre précipices tout autour ». Après avoir fait le tour de la « statue » de béton armé construite à l’effigie de quelque procédé de communication dont je ne saurais ici vous entretenir sans évoquer l’image binaire que celle-ci m’inspire chaque jour dans des programmes superposés, il fut aussi question d’en descendre avec toutes les précautions nécessaires. Une descente menée à tombeau ouvert... —pour utiliser cette expression plutôt cocasse— mais dans l’observation de la moindre règle de la prudence et du discernement. (Et entendez une dernière fois cette relation de parenté du cyclisme avec la pratique de l’alpinisme, où de la même manière, la sagesse commande qu’il faut, de la descente surtout vous méfier). J’ai regagné de cette façon le village de Ste Colombe, quelque part au pied du Mont et dans le rugissement de ce souvenir encore à l’état brut. Le détail de cerisiers mûrs, la couleur des oliviers, nuance du vert argent de l’absinthe; la perspective d’une boisson fraîche sous les ombrages du café Guintrand et d'une assiette recommandée à la table de la Colombe, juste après quelques brasses réparatrices dans la piscine de l'hôtel La Garance, et plus tard, la mer.
NÉON™



HÔTEL LA GARANCE
DANS LE HAMEAU DE STE COLOMBE



L’hôtel et sa piscine sont discrets, installés sur les bords de l’itinéraire (D974) décrit dans cet article. Propriétaires accueillants et clientèle bien élevée, conformément à l'altitude des lieux.

RESTAURANT LA COLOMBE

Le restaurant offre en été une terrasse relativement fraîche, et surtout silencieuse. La table est aménagée avec goût sous la vigne grimpante, éclairée aux bougies Un menu composé de produits du terroir, simple, léger et goûteux. Un rosé intelligent et le service parfait.