vendredi 18 février 2011

TRANSJURASSIENNE 2011 /2


MAKING OFF


À vrai dire, la neige manquait un peu cette année… Mais l’atmosphère du paysage et la chaleur « humaine » des gens du haut a largement compensé ce premier désenchantement. Un décor pour le moins insolite et des rencontres tout au long du parcours que l’on n’est pas prêt d’oublier. Anne Laure, Rosalie, François, Vincent, Antoine… Cette soirée culturelle d’abord… concoctée par François et son côté quand même un peu tête en l’air d’avoir oublié la neige pour commencer le tournage. Bon, passons pour cette fois, mais qu’on y revienne plus ! L’idée de faire connaissance dans un des endroits les plus reculés de la terre. Génial ! Juste quelques planches réunies autour d’une cheminée sous le Mont d’Or, et le parfum d’un Comté d’au moins dix ans d’âge pour accompagner les morilles sauvages. Un p’tit blanc du Jura plutôt onctueux pour se parler sans retenue et voir les yeux des gens pétiller à la lueur des bougies. Un début de tournage un peu dur j’en conviens.




TOURNAGE LA VEILLE DE LA COURSE SOUS LA FORÊT DU RISOUX
RAPHAEL DOUMERGUE & PIERRE MAYAYO
PHOTO © JL GANTNER

Quelques jours plus tard, J’ai retrouvé Vincent sur la piste de l’épreuve, disons à une dizaine de kilomètres du départ. Vincent jouait du tam tam au milieu de nul part alors que j’en bavais dans une montée interminable de la forêt dite du « Massacre »… On a bu un thé ensemble sur le bord d'un chemin de gel hallucinant, et discuté d’une sorte de coq de bruyère qui loge dans le coin pour faire chier les skieurs l’hiver. Je ne sais pas si vous voyez un peu le tableau d’un type fringué en skieur de fond avec une caméra accroché sur le sternum, en train de siroter son thé vert brûlant au milieu de nul part… Le tout sans se rendre compte que cet imbécile de journaliste de la télé régionale en couleur a les pieds plantés dans le nid d’un piaf en forme de poule toute noire qui fait tremblé toute la région depuis le début du week-end !

Un peu plus loin, un charpentier a continué de me renseigner sur la bestiole en question. Un oiseau mythique des hauteurs jurassiennes, comme une marque de fabrique locale qu’on imprime sur les boites à fromage. Une sorte de pygargue bien planté sur son drapeau américain, transposé en logo d’une culture traditionnelle rurale qui ne sait plus toujours sur quelle aile continuer de danser entre des problèmes de réchauffement climatique de plus en plus récurrents et la réalité économique d’un tiroir caisse qu’il faut bien continuer à faire fonctionner. Bref ! Comment vous dire ? Le type et son allure de vrai bûcheron détendait les épaules des coureurs sur le ravitaillement de la Darbella avec ses mains calleuses de scieurs des bois et ses yeux de prune sauvage gorgée de sucre pour nous parler de ses montagnes et de toute la nature qui dort dedans toute l’année… Un oiseau un « peu lourdaud, et qui attaquerait les touristes au printemps à cause de la sève des sapins dont le piaf raffole ». Le grand Tétras… shooté à la résine d’épicéa… et qui n’arrive plus à se souvenir de son nom même quand on lui demande poliment… Vous voyez un peu le travail ! Bon pour tout vous dire, je l’aime bien moi ce grand machin qui fait le paon au milieu des myrtilles et qui pique le cul des clients au printemps. Ses yeux rouge comme les peintures de guerre d'indiens. Les yeux d’un tas d’espèces menacées un peu partout sur la terre. Oui, voilà, je l’aime bien le grand Tétras, moi... Comme j’aime bien la montagne, les forêts du Jura, la bière des Rousses et les blondes, et puis quand même aussi le ski... Comme je vous le dis.



TIME LINE DU FILM DE LA TRANSJURASSIENNE 2011
PHOTO © JL GANTNER




Pour le reste… Une sacrée soirée à Bois d’Amont avec la famille Lacroix. Toute une famille de sportifs de haut niveau. Le truc du gars le plus fort du monde en forme d'un gêne transmissible de père en fils. Pas un seul de la bande pour rester à la buvette au lieu d'essayer de remporter une médaille à la maison ! Une soirée initiatique toute Bois « d’Amonesque » la veille de la course, comme le prétexte d'une plongée au large de la côte niçoise avec Guillaume. L’euphorie des profondeurs et du Macvin mélangés. Cette journée aussi, avec Jean-Pierre Henriet et tous ses élèves à l’école nationale de ski nordique, sous un ciel… un p'tit peu« niçois » lui aussi. Une météo « balnéaire » sur les pistes des Rousses. Un caméraman frigorifié et son ingénieur du son transi au petit matin sur les rives du lac des Rousses. Le truc de se récupérer un bon rhume juste pour trois secondes de film. (Mais si elles sont belles tes images, mon p'tit Raph ! C’est même Sophie qui l'a dit, alors tu vois !) Deux types embarqués sur un bateau de sauvetage qui manque de prendre l’eau de partout à cause du manque de neige un peu voyant sur les images… Deux matelots frigorifiés et un troisième qui voudrait qu’on rame encore, juste l’histoire de voir où ça mènera à la fin. une épopée.


Des heures de navigation à vue, entre les annonces d’annulation possible de la compétition et les changements d’itinéraires répétés. Les caprices météo et tous ceux que nous avions filmés, dans l’expectative, avant qu'ils renoncent finalement à prendre le départ. Des convictions que je respecte bien sûr. Le droit tout de même, à l'observation de quelque éthique à propos d’une nature fragile et de ceux qui la peuplent, dont il faudra bien finir un jour par parler en marge de tout intérêt partisan. (Et c'est tellement facile à dire comme ça !)

Pour le reste, oui… Des changements d’objectifs qui finissent par miner le moral des équipes sur le terrain. (Et je vous jure que « la mine » dans le service public, on connaît !... Je veux dire la mine des matins blêmes, la p’tite mine des jours gris, la mine générale des jours de brume un peu forte pour la saison…)

Des équipes au taf aux premières heures du jour pour essayer de convier le plus grand nombre de spectateurs à la fête, l’événement du ski nordique en France, une des plus grandes fêtes populaires de la région.Tous les gens sympas sur le parcours… Pas un grincheux, pas un rabat-joie. Rien que de la bonne humeur sous les skis et devant l’objectif de la caméra.




Pour finir... Cinq jours avec Alexandre aux manettes d’un montage supersonique. Une vraie course contre la montre pour terminer dans les clous le jour J, à l'heure H. Un final sur les chapeaux de roues avec Thomas au commande de son navire amiral audiophonique. Seize heures de boulot la veille de la diffusion, et la libération pour toute l’équipe à deux heures du matin, comme une deuxième ligne d’arrivée à franchir. Une séance de ski en mode « freestyle » dans la dernière bosse d'une piste noire verglacée et sans plaquettes de freins pour espérer se retenir aux piquets.


ALEXANDRE BAUDRAND AU MONTAGE
(18/02 à 20 heures)
PHOTO © JL GANTNER

THOMAS HARDY AU MIXAGE
(19/02 à 1 heure du matin)
PHOTO © JL GANTNER